La DGF pour 2024 est fixée à 27,145 Mds d’euros, contre 26,931Mds d’euros en 2023.

La DGF des communes et EPCI sera abondée de 220M€ :

  • 190M€ seront réservés aux dotations de péréquations communales que sont la dotation de solidarité rurale (+100M€) et la dotation de solidarité urbaine (90M€), la dotation nationale de péréquation n’étant pas abondée ;
  • Les 30M€ restant permettront de financer 1/3 de la progression de 90M€ de la dotation d’intercommunalité. Les 2/3 restants de la progression de la dotation d’intercommunalité (60M€) seront financés par la réduction de la dotation de compensation.

Le législateur a choisi d’imposer cette répartition pour 2024, et de laisser le choix pour les années suivantes au Comité des Finances Locales d’opérer la répartition de la progression de la DGF entre les dotations de péréquation communales et la dotation d’intercommunalité.

Minoration de la DCRTP et des FDTP

Afin de financer la progression de la dotation d’intercommunalité et de la DGF dans son ensemble, la minoration atteindra 67M€ en 2024. Le périmètre des variables d’ajustements pour 2024 intègre les parts communales, intercommunales, départementales et régionales de la Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), ainsi que les Fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FPDTP). Leurs crédits diminueront de 67M€, soit une diminution de la DCRTP et des FDTP de 2,0%. Les variables d’ajustements des années précédents (compensations fiscales notamment) ne seront pas impactées.

EPCI : plafonnement allégé de la dotation d’intercommunalité et institution d’une « attribution de compensation » pour la fiscalité additionnelle

Avec la réforme de la dotation d’intercommunalité de 2019, toutes les catégories d’EPCI ont été placées sur le même montant de dotation à l’habitant. Les communautés de communes, en particulier en fiscalité additionnelle, qui étaient les moins bien loties en dotations, ont été les grandes gagnantes. Toutefois, le législateur a mis en place un plafonnement à 110% de la dotation d’intercommunalité, si bien que pour nombre de communautés de communes, la croissance de la dotation d’intercommunalité est limitée à 10% pour de nombreuses années (soit en valeur des montants généralement faibles), et toute action sur le coefficient d’intégration fiscale est sans effet, la dotation d’intercommunalité étant déjà à sa progression maximale. A compter de 2024, la progression maximale de la dotation d’intercommunalité passe donc à 120%, soit un doublement.

Par ailleurs, dans un souci d’équité entre les intercommunalités à fiscalité professionnelle unique, qui reçoivent la dotation de compensation de leurs communes et subissent chaque année une minoration au titre des variables d’ajustement (en diminution pour financer la croissance de la DGF), et les intercommunalités à fiscalité additionnelle, beaucoup plus épargnées puisque les dotations de compensation communales sont restées au niveau communal et ne sont pas impactées par les baisses, le projet de loi de finances intègre l’obligation du transfert, pour tous les EPCI à fiscalité additionnelle, des dotations de compensation communales vers l’intercommunalité, à charge pour cette dernière de reverser à ses communes membres « une attribution ». Les EPCI à fiscalité additionnelle, subiront ainsi la diminution des dotations de compensation alors qu’ils doivent reverser à leurs communes membres un montant figé.

DSR cible et moyenne de revenu par habitant des 3 dernières années

Par ailleurs, les critères de la DSR cible sont révisés.  Pour mémoire, la DSR cible concerne les 10 000 premières communes classées selon un indice synthétique composé à 70% du rapport entre le potentiel financier par habitant et la moyenne de la strate démographique, et à 30% du rapport du revenu imposable par habitant à la moyenne de la strate démographique. Or, pour les petites communes, la variation du revenu imposable par habitant peut être importante, en fonction de l’arrivée ou de départ de contribuables, et peut avoir pour conséquence la sortie ou l’entrée dans le dispositif. Ce sont ainsi 15% des communes qui entrent et sortent du dispositif chaque année. Le PLF 2024 prévoit de prendre en compte la moyenne sur les 3 dernières années du revenu imposable par habitant pour le calcul de cet indice et de l’éligibilité, et non plus le seul revenu imposable par habitant de l’année précédente.

En outre, le PLF introduit une garantie de sortie à hauteur de la moitié de la dotation de l’année précédente, afin de lisser sur deux ans, les effets des sorties du dispositif DSR cible.

Communes d’outre-mer

Enfin pour les communes d’outre-mer, le coefficient de majoration de la population d’outre-mer (+56,5%) pour le calcul du volume de la dotation d’aménagement des communes d’outre-mer (correspondant aux enveloppes de DSR, DSU et DNP des communes métropolitaines), est pérennisé. Ce coefficient de majoration de la population était de 35% en 2019.

Communes nouvelles

Quelques dispositions techniques d’une part pour prévoir qu’en cas de défusion de communes, la dotation forfaitaire et les dotations de péréquation seront réparties à la population, compte tenu de l’absence de critères péréquateurs propres (potentiel fiscal, …), et dans l’attente de critères propres. Cela concerne donc l’année qui suit celle de l’arrêté de dissolution.

Les communes nouvelles, fusionnées sur le périmètre de la totalité d’un EPCI, reçoivent une dotation de compétences, correspondant à la DGF de leur ex EPCI. L’article 24 prévoit que cette dotation évoluera comme l’enveloppe nationale de la DGF des EPCI, compte tenu de l’absence d’indicateurs intercommunaux (potentiel fiscal et CIF).

Enfin, en cas de création de communes nouvelles, la garantie de non-baisse de la DSU est maintenue au niveau de la commune nouvelle, si l’une des communes fusionnées bénéficiait de la DSU depuis au moins 2 ans. Le montant garanti correspondant au montant perçu par les communes éligibles l’année précédant la fusion.

Les perspectives d’inflation et d’évolution du PIB à court terme

En 2023, la croissance du PIB serait ramenée à +1%, pénalisée par la politique monétaire. Elle serait principalement soutenue par la consommation des ménages, l’investissement des ménages et des entreprises reculant.

En moyenne annuelle, l’inflation est attendue pour 2023 à +4,2%.

Pour 2024, la croissance du PIB est estimée à +1,6%, et l’inflation hors tabac à 3,0%. La loi de programmation des finances publiques souligne l’incertitude élevée, notamment du fait du conflit en Ukraine et des évolutions des prix de l’énergie.

En matière de déficit public, la loi de programmation des finances publiques prévoit un déficit de 4,5% du PIB pour 2024, puis 4% en 2025, avant une réduction plus marquée à compter de 2023.

Source : Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, Procédure accélérée, Rapport annexé II.D., 2023

Rappel : La règle d’or d’équilibre des budgets locaux n’empêche pas d’accentuer le déficit public

En effet, le déficit public est une notion différente de l’équilibre budgétaire. Ainsi, toute collectivité qui accroît son encours de dette contribue à la hausse du déficit public ; à l’inverse, toute collectivité qui diminue son encours de dette contribue à la réduction du déficit public.

Rappelons que le déficit public correspond au solde des recettes sur les dépenses, hors dette (amortissement de la dette et nouveaux emprunts). Le déficit public est égal à l’augmentation de l’encours de dette de l’ensemble des acteurs publics d’une Nation. Par conséquent, un acteur public est en situation de déficit lorsqu’il emprunte plus qu’il ne rembourse d’emprunt.

Définition du déficit public

Définition du déficit public

C’est ainsi que l’évolution du déficit public de la Nation (APU) est présentée par sous-secteur, distinguant les administrations de l’Etat (APUC), des collectivités territoriales et leurs groupements (APUL), et du secteur social (ASSO).

Source : Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, Procédure accélérée, Rapport annexé II.D., 2023

Les projections de l’Etat sur l’évolution du déficit public sont donc basées sur une réduction des dépenses des collectivités territoriales (réduction des dépenses permettant la réduction du recours à l’emprunt et donc le désendettement), marquée en particulier à partir de 2026 : avec le cycle électoral, l’Etat s’attend à une forte réduction des dépenses, dont les dépenses d’investissement, pour les années 2026-2027.

C’est ainsi que la dette publique des collectivités territoriales, en pourcentage du PIB, serait en réduction continue sur la période, avec une tendance plus marquée pour 2026-2027.

Remarquons aussi que les administrations centrales de l’Etat (APUC) seraient elles à l’inverse dans une phase d’endettement : l’Etat anticipe une augmentation de son propre endettement, qui devrait être compensé par un désendettement des collectivités territoriales et des administrations du secteur social (nettement plus marqué).

La présentation du budget de l’Etat en une section de fonctionnement et une section d’investissement, à l’instar des collectivités, permet d’illustrer l’ampleur du déficit de l’Etat :

  • Une épargne nette négative à hauteur de -74% des recettes de fonctionnement,
  • Un taux d’épargne brute négative de -30%,
  • Une annuité de la dette représentant 60% des recettes de fonctionnement (intérêts et capital).

Source : Lois de finances successives.

Le cabinet Exfilo vous met à disposition son analyse du projet de loi de finances pour 2024.

Le PLF 2024 est basé sur des projections d’inflation à 3% hors tabac pour 2024 et une croissance du PIB à 1,6%. Le déficit public ressortirait à 4,5% en 2024 après 5% en 2023.

Ce projet de loi de finances doit s’analyse avec la Loi de programmation des finances publiques pour la période 2023-2027, qui, à l’instar de la précédente, affiche à nouveau des objectifs d’évolution des charges réelles de fonctionnement des collectivités territoriales, 0,5% moins fortement que l’inflation. Ceci conduit à une évolution « souhaitée » des charges réelles de fonctionnement pour 2024 de 2,5%, dans une perspective de 3% d’inflation.

Le projet de loi de finances pour 2024 intègre plusieurs dispositions, parmi lesquelles :

  • La refonte des dispositions de Zones de revitalisation rurale ZRR, Bassins d’emploi à redynamiser BER et zones de revitalisation du commerce en milieu rural ZORCOMIR, en un zonage unique appelé France Ruralités Revitalisation.. Ce nouveau zonage entrerait en vigueur au 1er juillet 2024, et son périmètre (les conditions « d’éligibilité » pour les communes) serait défini au niveau intercommunal voir départemental ;
  • Le début de la baisse des Dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) des communes et de leurs EPCI, celles des départements et régions étant intégrées depuis quelques années dans les variables d’ajustements, d’environ -2% en 2024. Par ailleurs, les dotations des FDTP seront elles aussi minorées de 2%
  • L’obligation du transfert des dotations de compensation des communes membres d’EPCI à fiscalité additionnelle vers leur intercommunalité, à charge pour celles-ci de leurs reverser un montant figé. Dorénavant, les EPCI à fiscalité additionnelle subiront eux aussi la baisse des dotations.
  • La réforme des redevances des agences de l’eau, avec l’instauration de redevances dues par les communes en fonction du taux de fuite et de l’existence d’une programmation d’amélioration des réseaux d’eau potable et usées

Dans son rapport sur les finances publiques locales publié le 04 juillet 2023, la Cour des Comptes appelle à la participation des collectivités locales au redressement des finances publiques.

En effet, l’Institution met en avant une situation financière des collectivités particulièrement favorable avec notamment une épargne brute en hausse de +5,7% à périmètre constant entre 2021 et 2022. En parallèle, les dépenses d’investissement atteignent un niveau inédit avec 68,2 Md€ en 2022 portées par le plan de relance engagé par l’Etat et par l’inflation. A noter également que la capacité de désendettement poursuit sa baisse depuis 2016 (hors année 2020 marquée par la crise sanitaire) pour atteindre 4,3 ans en moyenne en 2022.

Enfin, la Cour pointe le solde du compte des collectivités au Trésor qui atteint près de 60 Md€ en 2022.

La mise en perspective de ce constat favorable avec celui, qui l’est beaucoup moins, des finances publiques et plus particulièrement des finances de l’Etat, pousse la Cour des Comptes à demander clairement une participation plus importante des collectivités au redressement des finances publiques : « la situation financière favorable des collectivités doit avoir pour contrepartie une participation accrue de leur part à l’effort global de redressement des finances publiques ».

Pour justifier sa position, la Cour précise que la bonne situation des collectivités locales résulte évidemment de leurs choix de gestion mais aussi :

  • des transferts d’impôts nationaux dont la dynamique est supérieure aux impôts locaux supprimés (l’analyse de la croissance porte toutefois sur une période assez limitée et marquée par un fort niveau de croissance et d’inflation) ;
  • et des protections octroyées par l’Etat pendant la crise sanitaire en 2020 et la poussée d’inflation en 2022, la nature et les modalités de calcul des soutiens financiers de l’État aux collectivités concourant « à son déficit et à son endettement très élevés ».

Il n’est cependant pas inutile de rappeler que la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales ne résulte pas d’une décision des élus locaux (qui y étaient par ailleurs très attachés) mais du Gouvernement de l’époque et que les nouveaux produits perçus ne visent qu’à compenser la perte du produit de THRP, ne représentant donc pas en ce sens une recette supplémentaire.

La Cour des Comptes préconise notamment le partage de la dynamique des recettes de TVA (qui viennent remplacer la THRP et la CVAE) entre l’Etat et les collectivités (aujourd’hui, celles-ci bénéficient de l’intégralité de la dynamique) ainsi qu’un renforcement des mécanismes de réserve des recettes (lissage des variations conjoncturelles) afin que l’Etat ne soit pas systématiquement appelé à intervenir en cas de conjoncture économique défavorable (baisse des recettes de DMTO, baisse des recettes de TVA, inflation élevée, etc.).

Ces dispositions pourraient venir s’ajouter à celle qui prévoit la diminution du volume des dépenses des plus grosses collectivités à raison de 0,5 point par an entre 2024 et 2027. Ce dispositif qui figurait dans la loi de programmation des finances publiques 2023-2027, rejetée par les députés en décembre 2022, est inscrit dans le programme de stabilité envoyé en avril 2023 à la Commission européenne et pourrait donc refaire son apparition dans la future loi de programmation des finances publiques.

Cette participation au redressement des finances publiques devrait également s’adapter aux disparités financières existantes entre collectivités de même catégorie, mises en évidence par la Cour des Comptes et les associations d’élus locaux.

Le Sénat a supprimé le caractère obligatoire du reversement de la taxe d’aménagement des communes vers leur EPCI, qui était institué par la loi de finances pour 2022 (article 109). La loi de finances rectificative (LFR) pour 2022 (du 1er décembre), article 15, entérine ce retour à l’état initial : l’article 1379 du code général des impôts est modifié pour revenir à une simple option de reversement.

Cet article de la LFR 2022 indique par ailleurs que les délibérations existantes prises en 2022 (pour 2022 et/ou pour 2023), de reversement de la taxe d’aménagement peuvent rapportées ou modifiées dans un délai de 2 mois (à compter du 1er décembre, date de publication de la loi, soit jusqu’au 31 janvier 2023).

Deux paragraphes additionnels de la LFR 2022 ont interpelés nos collectivités clientes : la mention de pertes de recettes compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement (et le financement de ce dispositif par une majoration de la taxe sur les tabacs).

Il s’agit bien évidemment d’une « erreur technique » : ces paragraphes sont ajoutés dans de très nombreux amendements, pour la recevabilité financière de ceux-ci (une dépense nouvelle doit être financée par une recette nouvelle). Ils n’auraient pas dû être repris dans le texte de loi.

C’est ainsi que l’article 37AA de la loi de finances 2023 adoptée, apporte un aménagement technique en supprimant les deux paragraphes en question.

Ainsi,

  • Le reversement de la taxe d’aménagement des communes vers leur EPCI est optionnel,
  • Les délibérations qui ont pû être prises, peuvent être rapportées jusqu’au 31 janvier 2023,
  • Et il n’y a pas de supplément de DGF pour les communes qui auraient adoptés ces conventions de reversements de taxe d’aménagement.

Article 5 du projet de loi de finances pour 2023.

La cotisation à la valeur ajoutée (CVAE) sera supprimée progressivement en 2023 et 2024, pour les entreprises. Ainsi, pour 2023, le taux d’imposition de la valeur ajoutée pour la CVAE est ainsi réduit de moitié pour 2023, puis sera supprimé en 2024.

Par contre, les articles du code général des impôts et du code général des collectivités territoriales relatifs aux recettes perçues par les collectivités territoriales sont supprimés dès 2023, ainsi que les compensations d’exonérations de CVAE. Ceci implique que les collectivités perdront dès 2023 la totalité de la CVAE, et que celle-ci sera compensée intégralement dès 2023, selon les modalités décrites ci-dessous.

La perte de CVAE sera compensée pour les collectivités territoriales par une fraction de la TVA nationale, calculée comme suit :

  • Moyenne de la CVAE perçue par chaque collectivité entre 2020 et 2022, ainsi que le cas échéant des compensations d’exonération de CVAE 2020-2022,
  • Montant du produit net des remboursements de la Taxe sur la valeur ajoutée encaissé en 2022.

Ainsi, ce n’est pas le montant de CVAE encaissé en 2022 qui sera garanti, mais la moyenne des montants encaissés sur les exercices 2020, 2021 et 2023.

Par contre, la dynamique de cette fraction de TVA ne sera pas restituée individuellement. En effet, l’article 5 du PLF 2023 organise le versement de cette fraction de TVA en deux parts :

  • Une part individuelle et figée, égale à la somme des produits compensés (moyenne de CVAE encaissée entre 2020 et 2022 et moyenne des compensations de CVAE 2020 à 2022) ;
  • Le solde entre la fraction de TVA et la part figée, s’il est positif, sera affectée à un « fonds national de l’attractivité économique des territoires, […], afin de tenir compte du dynamisme de leurs territoires respectifs, selon des modalités définies par décret. »

En résumé, dès 2023,

  1. Les collectivités territoriales et EPCI ne percevront plus de CVAE,
  2. Mais recevront une fraction de TVA égale à la moyenne des produits de CVAE encaissés par chaque collectivité entre 2020 et 2022,
  3. Et à cela, pourra s’ajouter, sans que l’on en connaissance pour l’heure les modalités de reversement, un dynamisme, qui pourrait être attribué au cas par cas selon des modalités à définir.

En effet, dans la partie préliminaire du projet de loi de finances pour 2023, le Gouvernement précise que « la dynamique annuelle de cette fraction de TVA sera affectée à un fonds national d’attractivité économique des territoires dont les modalités de répartition, tenant compte du dynamisme économique de leurs territoires respectifs, seront arrêtées à l’issue d’une concertation avec les collectivités locales. »

Il convient de noter que l’exposé des motifs de cet article précise que la compensation de la CVAE serait attribuée aux « collectivités bénéficiant en 2022 de recettes de CVAE », ce qui serait injuste au vu du mode de calcul qui prend en compte la moyenne, et, sauf erreur, nous n’avons pas retrouvé dans la rédaction de l’article cette limitation de la compensation aux seuls communes et EPCI ayant reçus en 2022 un produit. Le cas devrait être toutefois assez marginal.

Le projet de loi de finances pour 2023 est établit dans un contexte économique incertain. La prévision de croissance du PIB pour 2023 est estimée à 1,0%, et l’inflation à 4,1%, compte tenu dans la projection d’une inflation plus forte en début d’année 2023 mais qui diminuerait pour s’approcher des 3% fin 2023.

Notons aussi que la loi de programmation des finances publiques, qui projette l’évolution des comptes de la Nation à horizon 2027, et du déficit public au sens de Maastricht, précise les « objectifs » de déficit public de la Nation, de l’Etat, de la sécurité sociale et des collectivités locales.

Ainsi, il est attendu une diminution des dépenses des collectivités en volume hors inflation), de 0,5% par an, puisque l’exposé préliminaire de la loi de finances indique une évolution des dépenses des collectivités 0,5 point moins rapide que l’inflation. Au final, il est attendu une quasi stabilisation de l’endettement des collectivités entre 2023 et 2025, avant une phase de désendettement en 2026 et 2027.

La loi de finances intègre plusieurs dispositions, dont il convient d’en relever quatre en particulier :

  • La suppression de la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE) : dès 2023, les collectivités locales ne recevront plus de CVAE, mais recevrait une fraction de TVA. Toutefois, le dispositif imaginé ici conduit à une dotation figée pour chaque collectivité, et une « possible » croissance de cette fraction de TVA les années futures qui serait affectée à un « fonds national de l’attractivité économique des territoires », dont le contour et les modalités de répartition restent à définir ;
  • La suppression du critère de la longueur de voirie communale pour la répartition de la Dotation de Solidarité Rurale (fraction péréquation), à laquelle les communes notamment rurales sont très attachées, par un critère de densité démographique et de population, ce qui ne sera pas sans effets sur les montants individuels. Nous sommes en cours de simulations des effets du changement de ces critères ;
  • La suppression du critère d’un effort fiscal agrégé supérieur à 1 pour bénéficier du reversement du FPIC : de part notre expérience, nous avons pu voir que ce seul critère conduisait à l’inéligibilité de plusieurs territoires ruraux, notamment en fiscalité additionnelle, qui pourraient ainsi devenir dorénavant bénéficiaire du reversement du FPIC ;
  • La stabilisation de l’effort fiscal, par la poursuite de la neutralisation intégrale des effets de la réforme (liée à la suppression de la taxe d’habitation et au retrait des produits intercommunaux du calcul) ;

Le rapport 2022 sur la situation des finances des collectivités locales et de leurs établissements publics, anticipe sur le retour de la participation du secteur public local au redressement des comptes de la Nation.

Deux points sont à souligner, outre l’appréciation sur la bonne santé des collectivités locales qui laisse songeur.

Premier paragraphe, page 61 du rapport : l’auto-assurance des recettes.

« Il [le constat de la bonne santé financière des collectivités locales par la Cour des Comptes] invite également les collectivités locales, dont les récentes réformes fiscales ont accentué la sensibilité à la conjoncture économique, à s’organiser pour faire face aux futurs aléas, à travers l’instauration de mécanismes d’auto-assurance. »

Ce principe évoqué « d’auto-assurance » (individuel ou collectif ?) correspond à la mise en réserve des excédents de recettes par rapport aux prévisions sur quelques recettes fiscales, comme cela est actuellement possible pour les droits de mutation à titre onéreux des départements.

De là à sentir poindre la tentation d’instituer un tel mécanisme pour la quote-part de TVA des intercommunalités, départements et régions, il n’y a qu’un pas. Quelle différence avec la transformation de cette recette en dotation ? A priori, un effet de cliquet à la hausse (la « mise en réserve » des bonnes nouvelles sur la progression de la recette), mais pas à la baisse (une fois épuisé les volumes en réserve).

Paragraphes 2 à 5, page 61 du rapport : la contribution à l’effort de redressement.

« Enfin, alors qu’une nouvelle loi de programmation est attendue à l’automne, le principe d’une contribution du secteur public local au redressement des finances publiques apparaît légitime au regard des situations financières respectives des administrations publiques.
Dans cette hypothèse, plusieurs leviers d’inégale portée seraient théoriquement disponibles : l’encadrement du rythme d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement ; le recours à un critère fondé sur l’autofinancement ; la fixation d’un ratio d’endettement ; la définition d’un objectif d’évolution du besoin annuel de financement ; la réduction programmée dans le temps de certaines recettes.
Le choix de la reconduction d’un objectif d’encadrement des dépenses de fonctionnement impliquerait de lever les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des contrats de Cahors, dans un contexte différent de celui qui prévalait en 2017 (augmentation de la dépendance des recettes à la conjoncture, risque inflationniste élevé et hétérogène, etc.). Un critère fondé sur l’autofinancement pourrait faciliter la prise en compte de la diversité des modes de gestion locaux mais devrait être associé à une trajectoire pluriannuelle de recettes de manière à neutraliser les effets de cycle économique.
Les modalités de cette contribution s’inscriront dans un contexte économique incertain, caractérisé en particulier par un niveau d’inflation élevé. Sa prise en compte implique de déterminer son incidence nette sur les finances locales, sans se limiter aux seuls surcoûts.
« .

La Cour des comptes relève plusieurs outils pour faire participer les collectivités à l’effort de redressement des comptes de la Nation, dont il faut le rappeler, elles sont faiblement contributrices, compte tenu de leur obligation d’équilibre de leurs comptes. Il s’agit donc de trouver un mécanisme pour ponctionner les collectivités, puisque malgré les diminutions de recettes (TP, DGF, …), elles sont toujours en bonne situation financière. La cour cite ainsi quatre mesures dont les trois premières sont déjà connues ou expérimentées :

  • Un objectif d’encadrement des dépenses,
  • Un objectif d’évolution du besoin annuel de financement (ou comment « inciter » les collectivités à se désendetter pour compenser la hausse de l’endettement de l’Etat, car rappelons-le le déficit public, c’est la mesure de l’accroissement de l’encours de la dette, lire ici pour plus d’information),
  • La réduction de certaines recettes, ce qui va être à nouveau le cas avec la CVAE, après la CFE, la TP, la DGF, ….,
  • Le recours à un critère fondé sur l’autofinancement (« associé à une trajectoire pluriannuelle des recettes », mais pas des dépenses?).

La taxe d’aménagement est applicable notamment à toutes les opérations d’aménagement, de construction, de reconstruction et d’agrandissement de bâtiments ou d’installations, nécessitant une autorisation d’urbanisme.

L’article L.331-2 du code de l’urbanisme prévoit que la part communale de la taxe d’aménagement est instituée :

  • De plein droit dans les communes dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un plan d’occupation des sols, sauf renonciation expresse dédiée par délibération dans les conditions prévues au neuvième alinéa ;
  • Par délibération du conseil municipal dans les autres communes.

Jusqu’à fin 2021, au huitième alinéa du présent article, tout ou partie de la taxe perçue par la commune pouvait être reversée à l’EPCI ou aux groupements de collectivités dont elle est membre, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de la commune, de leurs compétences, et ce dans les conditions prévues par délibérations concordantes du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’EPCI ou de groupement de collectivités.

Autrement dit, jusqu’en 2021 le reversement de la taxe d’aménagement des communes vers leur EPCI était facultatif. Ce reversement se faisait avec l’accord desdites communes qui devaient délibérer et en fixer les modalités au sein de conventions signées de façon contradictoire avec leur EPCI de rattachement.

Nouvelle version au 1er janvier 2022

L’article 109 de la loi de finances 2022 rend obligatoire le reversement de la taxe d’aménagement entre communes membres et EPCI au prorata des charges de financement des équipements assumés par chaque collectivité. Ainsi, au huitième alinéa de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, les mots « peut être » sont remplacés par le mot « est ».

« Tout ou partie de la taxe perçue par la commune est reversé à l’établissement public de coopération intercommunale ou aux groupements de collectivités dont elle est membre, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de cette commune, de leurs compétences, dans les conditions prévues par délibérations concordantes du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du groupement de collectivités ».

En d’autres termes, la loi de finances 2022 a transformé la possibilité de reverser de la taxe d’aménagement, entre des communes membres et leur EPCI de rattachement, en obligation.

Une motivation pour une justice fiscale et financière :

  • A la fois parce que l’obligation de reversement existe déjà, et de façon obligatoire, dans le sens inverse entre EPCI et commune. En effet, l’article L.331-2 du code de l’urbanisme prévoit que, lorsque la taxe d’aménagement est perçue de plein droit dans les communautés urbaines, les métropoles et la métropole de Lyon, sauf renonciation expresse, ou par délibération de l’organe délibérant dans les autres EPCI compétents en matière de plan local d’urbanisme en lieu et place des communes qu’ils regroupent et avec leur accord, une délibération prévoit les conditions de reversement de tout ou partie de la taxe perçue par l’EPCI à ses communes membres compte tenu de la charge des équipements publics relevant de leurs compétences. Rendre obligatoire le versement de la taxe d’aménagement entre communes et EPCI ne fait donc, en cela, que répondre à une justice fiscale légitime, l’obligation existant déjà dans le sens inverse.
  • Mais aussi parce que, notamment au sein des ZAE qui depuis la loi Notre exclusivement de compétence communautaire (la notion d’intérêt communautaire pour les ZAE ayant été supprimée à compter du 1er janvier 2017) il est admis de tous que la perception par une commune de la taxe d’aménagement versée par les entreprises s’installant sur les ZAE visées alors même que la commune n’a plus à supporter aucun des coûts d’équipement afférents à la viabilisation de ces dernières, constitue une injustice fiscale totale pour l’EPCI compétent (sauf évidemment pour les ZAE entièrement financées par les communes et qui n’auraient été que récemment transférées à leur EPCI de rattachement).

Ces clés de partage et de reversement devront tenir compte de la charge des équipements publics assumée par chaque collectivité concernée eu égard à leurs compétences respectives, par délibération concordante de l’organe délibérant de la commune et de l’intercommunalité. Mais elles pourraient également s’appuyer sur une sectorisation appropriée des taux de taxe d’aménagement appliqués sur le territoire.

La modification des modalités de calcul des critères de péréquation, potentiels fiscaux, financiers, efforts fiscaux, entrera bien en vigueur au 1er janvier 2022.

Si la rédaction issue de la LF 2021 permet d’intégrer le nouveau panier fiscal des communes et EPCI, un point nous interpelle pour le mode de calcul des potentiels fiscaux et financiers des communes, et n’est pas modifié par la rédaction de la loi de finances pour 2021.

En effet, pour la prise en compte de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans le potentiel fiscal et financier, l’article L.2334-4 du code général des collectivités territoriales issue de la loi de finances pour 2021 (donc celui qui entrera en application au 01/01/2022), précise au point I que sont pris en compte les deux produits suivants :

Premier produit FB

« 1° bis Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 multipliée par le coefficient correcteur mentionné au B du IV de l’article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ; ».

Ainsi, le produit de foncier bâti pour le potentiel fiscal est valorisé à hauteur de la somme taux communal et taux départemental reçu en compensation de la suppression de la taxe d’habitation, pondéré par le coefficient correcteur qui vise à ce que le « nouveau » produit de foncier bâti ne soit pas inférieur au produit de taxe d’habitation sur les résidences principales supprimé pour la commune.

Le produit de foncier bâti et d’ex – produit de taxe d’habitation est donc valorisé directement dans le potentiel fiscal, au taux communal, alors que précédemment, taxe d’habitation et taxe sur le foncier bâti étaient valorisés aux taux moyen national.

Second produit FB

1° ter Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la différence entre le taux moyen national communal[1] d’imposition de cette taxe et la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 ; »

Deuxièmement, le premier produit est « corrigé » de la différence entre le taux moyen national de foncier bâti et le « nouveau » taux communal de foncier bâti (avec l’ex-taux départemental). Cette procédure vise à pallier le fait que dans le premier terme, c’est le taux communal qui est pris en compte.

Mais le second produit mesure l’écart entre le taux moyen national de foncier bâti (communal et ex départemental) et le taux « facial » communal (avec l’ex -taux départemental). Or, la commune perçoit un produit et un niveau de richesse pondéré par le coefficient correcteur.

La logique du calcul proposé est claire : le second produit vise à ajouter au premier, l’écart entre le taux moyen national et le « nouveau » taux communal 2020. Toutefois, en n’appliquant pas le coefficient correcteur (ni communal ni moyen national), on introduit un biais et une différence par rapport aux potentiels fiscaux et financiers 2020. Car en moyenne au niveau national, le coefficient correcteur n’est pas égal à 1 : le produit de foncier bâti départemental n’a pas représenté strictement le produit de taxe d’habitation communal supprimé.

Le mode de calcul du potentiel fiscal « foncier bâti » est au terme de ces deux :

Premier produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020) x coefficient correcteur

+ Second produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux moyen national Foncier bâti N-1 – Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020)

Soit, écrit autrement :

Bases brutes communales FB N-1 x [ Taux moyen national Foncier Bâti N-1 + (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental Foncier bâti 2020) x (coefficient correcteur – 1) ]

Le taux moyen national de Foncier bâti est corrigé du supplément ou de la minoration au titre du coefficient correcteur appliqué au taux communal. En moyenne, on a donc le taux moyen national. Mais il eut fallu corriger aussi le taux moyen national du niveau du coefficient correcteur moyen national.

Nos simulations témoignent que les écarts à la moyenne des potentiels fiscaux et financiers de l’ensemble des communes sont impactés avec des variations souvent sensibles. Pour les EPCI, les variations des écarts à la moyenne des potentiels fiscaux sont bien plus modestes.

Notons toutefois, qu’un mécanisme de correction est prévu, afin de lisser dans le temps les effets de cette suppression : les potentiels financiers et fiscaux 2022 seront corrigés d’une fraction permettant de neutraliser les effets de la suppression de la taxe d’habitation (et de la réduction de moitié des valeurs locatives des locaux industriels). Cette fraction sera intégrée en totalité dans les potentiels fiscaux et financiers pour 2022, puis en réduction les années suivantes : 90% en 2023, 80% en 2024, puis -20% par an, jusqu’à une absence de fraction de correction à partir de 2028.

Le mode de calcul précis de ces fractions de corrections, qui doivent neutraliser pour 2022, les écarts, doit être précisé par un décret. Nous ne savons pas pour l’heure comment ils seront calculés.

Espérons qu’au cours de l’année 2022, et malgré l’élection présidentielle, des ajustements puissent être apportés. L’année 2022 permettra au moins de voir précisément l’ampleur de ces fractions de corrections.


[1] L’article 47 de la loi de finances pour 2022 est venue supprimer cette mention, ce qui implique que les taux additionnels de foncier bâti seront à prendre en compte dans le calcul.