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Les dispositions de l’article 5 du projet de Loi « Engagement & Proximité », actuellement en cours d’examen au Sénat, puis en novembre à l’Assemblée nationale, traitent de l’exercice des compétences « eau potable » et « assainissement ».

L’objectif du Gouvernement est de proposer plus de souplesse quant aux modalités de transfert et d’exercice des compétences au sein du bloc communal.

A ce titre, un dispositif de « gestion déléguée » par une Commune pour le compte de l’Etablissement Public Coopération Intercommunale (E.P.C.I.) compétent a été introduit dans le projet de Loi, tel que présenté au Conseil des Ministres le 17 juillet dernier.

Un amendement au texte initial proposé par le Gouvernement à l’occasion de l’examen du projet de texte par les Sénateurs le 7 octobre dernier apporte des précisions quant aux modalités de cette gestion déléguée.

Cet amendement prévoit également, et c’est une nouveauté, la possibilité pour un E.P.C.I. de déléguer la compétence à un syndicat intercommunal d’eau ou d’assainissement « existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre d’une communauté de communes (…) ou d’une Communauté d’Agglomération ».

Ces dispositions remettent ainsi en selle des Syndicats qui avaient vocation à être dissous.

Avec la Loi NOTRe (2015), un syndicat devait couvrir des Communes de trois E.P.C.I. pour se maintenir.

Avec la Loi « Ferrand-Fesneau » (2018), le seuil avait été abaissé à deux E.P.C.I.

Avec la Loi « Engagement & Proximité », en cours de discussion, le syndicat pourrait se voir déléguer la gestion par un seul E.P.C.I.

Dans ce cas, comme pour la délégation aux Communes, une Convention, adoptée par Délibération, et précisant les objectifs en termes de qualité de service rendu et de pérennité des infrastructures, le plan pluriannuel d’investissement, les moyens humains et financiers consentis et les indicateurs de suivi, devra être adoptée.

Dans le cas contraire, il serait procédé à la dissolution ou à la réduction des missions du syndicat.

Lors de son intervention en clôture du 100ème Congrès des Maires, le Président de la République a évoqué un assouplissement des dispositions de la Loi NOTRe quant au transfert, jusque-là obligatoire au 1er janvier 2020, des compétences « eau » et « assainissement ».

En indiquant que « nous ne souhaitons pas revenir sur les principes de la Loi NOTRe, mais (…) il faut apporter de la souplesse dans sa mise en œuvre », le Président de la République a répondu aux attentes formulées dans les territoires, notamment les territoires ruraux.

La référence dans son discours au dispositif mis en œuvre pour les Plans locaux d’urbanisme intercommunaux (P.L.U.I.) est explicite : ce dispositif prévoyait la possibilité pour les Communes de s’opposer au transfert de compétence, dès lors qu’une minorité de blocage rassemblait a minima 25% des Communes, représentant 20% de la population. Cette possibilité serait offerte « pour une période transitoire » dont les termes restent à définir.

Au vu de ces annonces, les territoires doivent-ils pour autant arrêter toute réflexion ?

Comme le rappelle également le Président de la République dans son intervention, un exercice des compétences « eau » et « investissement » au niveau intercommunal permettrait de mutualiser les études et les investissements pour la modernisation des équipements et des réseaux.

Cette mutualisation deviendrait d’autant plus nécessaire que les Agences de l’Eau, dont les subventions représentent bien souvent plus de la moitié des financements, sont par ailleurs mises à contribution par Bercy pour le rétablissement des comptes publics nationaux… Le Président de la République dans son discours a ainsi appelé la Caisse des Dépôts et ses offres de financement à la rescousse, … même s’il s’agirait là de prêts et pas de subventions.

Au-delà de la mutualisation des investissements futurs, se posaient les questions relatives l’harmonisation des modes de gestion et des tarifications locales. Or, sur ces deux points, deux circulaires ministérielles des 13 juillet 2016 et du 18 septembre 2017 indiquaient, d’une part, que la territorialisation des modes de gestion était admise au sein des périmètres des communautés de communes ou d’agglomération et, d’autre part, que des différenciations tarifaires par secteurs géographiques restaient permises, dans les limites définies par la jurisprudence.

Portage intercommunal des investissements et gestion quotidienne au plus près des usagers pourraient donc aller de pair, y compris dans le cadre d’un transfert des compétences « eau » et « assainissement » selon les modalités en vigueur à ce jour.

Pour conclure, rappelons que parallèlement à cette capacité à décaler dans le temps le transfert des compétences « eau » et « assainissement », aucune disposition n’est venue remettre en question la nécessité d’exercer neuf des douze compétences listées à l’article 5214-23 du C.G.C.T. au 1er janvier 2018 pour bénéficier de la bonification de la Dotation d’Intercommunalité telle que définie à l’article L5211-29 du même code.

La Loi NOTRe du 7 août 2015 impose le transfert des compétences Eau et Assainissement des communes vers les E.P.C.I. au 1er janvier 2020.

Ce sont des services publics à caractère industriel et commercial (S.P.I.C.). Dans le cas où les compétences Eau et Assainissement sont gérées dans des budgets communaux annexes distincts, leur transfert à l’E.P.C.I. entraîne la clôture de ces budgets annexes.

Le droit commun de la mise à disposition, prévu aux articles L.5211-5 et L.5211-17 du C.G.C.T., ne diffère pas entre les S.P.I.C. et les services publics administratifs (S.P.A.). Ainsi, le transfert de compétence relevant d’un S.P.I.C. à l’E.P.C.I. entraîne la mise à disposition à titre obligatoire des immobilisations nécessaires à l’exercice du service, ainsi que le transfert des droits et obligations y afférent, notamment les emprunts.

Le Ministère de l’Intérieur et le Ministère des Finances ont rappelé les modalités spécifiques qui s’appliquent en matière de clôture des budgets annexes des services publics à caractère industriel et commercial dans une circulaire commune de la Direction générale de la comptabilité publique et la Direction générale des collectivités territoriales[1].

La circulaire prévoit une procédure en trois étapes :

  1. Clôture du budget annexe communal M49 dédié au S.P.I.C. et réintégration de l’actif et du passif dans le budget principal de la commune,
  2. Mise à disposition des biens meubles et immeubles utilisés, à la date du transfert, pour l’exercice de la compétence, ainsi que des emprunts et subventions transférables ayant servi à financer ces biens,
  3. Possibilité de transfert des excédents et déficits à l’EPCI.

A l’issue de de la première étape budgétaire du transfert des compétences Eau et Assainissement, les résultats budgétaires ou excédents de clôture du budget annexe communal ainsi que les restes à réaliser sont donc nécessairement intégrés en totalité au budget principal de la commune.

La règle générale est la suivante : les résultats budgétaires de l’exercice précédant le transfert de compétences sont maintenus dans la comptabilité de la commune, car ils sont la résultante de l’activité de celle-ci lorsqu’elle était compétente.

Toutefois, les S.P.I.C. constituent un cas particulier, puisque ils sont soumis au principe de l’équilibre financier (art. L.2224-1 CGCT) qui nécessite l’individualisation des dépenses et des recettes au sein d’un budget spécifique, assortie de l’impossibilité de financement par le budget principal (art. L.2224-2 CGCT, sauf dispositions spécifiques). De ce fait, les déficits et les excédents résultants strictement de l’exercice de la compétence peuvent être identifiés. S’il est donc interdit de transférer les résultats budgétaires des services publics administratifs, « s’agissant des SPIC, les résultats budgétaires du budget annexe communal, qu’il s’agisse d’excédents ou de déficits, peuvent être transférés en tout ou partie. Ce transfert doit donner lieu à délibérations concordantes de l’EPCI et de la (des) commune(s) concernée(s). ».

Le transfert des résultats budgétaires à l’EPCI bénéficiaire du transfert de compétence ne constitue donc pas une obligation mais relève d’une possibilité.

[1] « L’intercommunalité après la loi du 12 juillet 1999 », version actualisée du 2 juillet 2001, chapitre 1-3-5, page 17.