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La modification des modalités de calcul des critères de péréquation, potentiels fiscaux, financiers, efforts fiscaux, entrera bien en vigueur au 1er janvier 2022.

Si la rédaction issue de la LF 2021 permet d’intégrer le nouveau panier fiscal des communes et EPCI, un point nous interpelle pour le mode de calcul des potentiels fiscaux et financiers des communes, et n’est pas modifié par la rédaction de la loi de finances pour 2021.

En effet, pour la prise en compte de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans le potentiel fiscal et financier, l’article L.2334-4 du code général des collectivités territoriales issue de la loi de finances pour 2021 (donc celui qui entrera en application au 01/01/2022), précise au point I que sont pris en compte les deux produits suivants :

Premier produit FB

« 1° bis Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 multipliée par le coefficient correcteur mentionné au B du IV de l’article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ; ».

Ainsi, le produit de foncier bâti pour le potentiel fiscal est valorisé à hauteur de la somme taux communal et taux départemental reçu en compensation de la suppression de la taxe d’habitation, pondéré par le coefficient correcteur qui vise à ce que le « nouveau » produit de foncier bâti ne soit pas inférieur au produit de taxe d’habitation sur les résidences principales supprimé pour la commune.

Le produit de foncier bâti et d’ex – produit de taxe d’habitation est donc valorisé directement dans le potentiel fiscal, au taux communal, alors que précédemment, taxe d’habitation et taxe sur le foncier bâti étaient valorisés aux taux moyen national.

Second produit FB

1° ter Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la différence entre le taux moyen national communal[1] d’imposition de cette taxe et la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 ; »

Deuxièmement, le premier produit est « corrigé » de la différence entre le taux moyen national de foncier bâti et le « nouveau » taux communal de foncier bâti (avec l’ex-taux départemental). Cette procédure vise à pallier le fait que dans le premier terme, c’est le taux communal qui est pris en compte.

Mais le second produit mesure l’écart entre le taux moyen national de foncier bâti (communal et ex départemental) et le taux « facial » communal (avec l’ex -taux départemental). Or, la commune perçoit un produit et un niveau de richesse pondéré par le coefficient correcteur.

La logique du calcul proposé est claire : le second produit vise à ajouter au premier, l’écart entre le taux moyen national et le « nouveau » taux communal 2020. Toutefois, en n’appliquant pas le coefficient correcteur (ni communal ni moyen national), on introduit un biais et une différence par rapport aux potentiels fiscaux et financiers 2020. Car en moyenne au niveau national, le coefficient correcteur n’est pas égal à 1 : le produit de foncier bâti départemental n’a pas représenté strictement le produit de taxe d’habitation communal supprimé.

Le mode de calcul du potentiel fiscal « foncier bâti » est au terme de ces deux :

Premier produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020) x coefficient correcteur

+ Second produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux moyen national Foncier bâti N-1 – Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020)

Soit, écrit autrement :

Bases brutes communales FB N-1 x [ Taux moyen national Foncier Bâti N-1 + (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental Foncier bâti 2020) x (coefficient correcteur – 1) ]

Le taux moyen national de Foncier bâti est corrigé du supplément ou de la minoration au titre du coefficient correcteur appliqué au taux communal. En moyenne, on a donc le taux moyen national. Mais il eut fallu corriger aussi le taux moyen national du niveau du coefficient correcteur moyen national.

Nos simulations témoignent que les écarts à la moyenne des potentiels fiscaux et financiers de l’ensemble des communes sont impactés avec des variations souvent sensibles. Pour les EPCI, les variations des écarts à la moyenne des potentiels fiscaux sont bien plus modestes.

Notons toutefois, qu’un mécanisme de correction est prévu, afin de lisser dans le temps les effets de cette suppression : les potentiels financiers et fiscaux 2022 seront corrigés d’une fraction permettant de neutraliser les effets de la suppression de la taxe d’habitation (et de la réduction de moitié des valeurs locatives des locaux industriels). Cette fraction sera intégrée en totalité dans les potentiels fiscaux et financiers pour 2022, puis en réduction les années suivantes : 90% en 2023, 80% en 2024, puis -20% par an, jusqu’à une absence de fraction de correction à partir de 2028.

Le mode de calcul précis de ces fractions de corrections, qui doivent neutraliser pour 2022, les écarts, doit être précisé par un décret. Nous ne savons pas pour l’heure comment ils seront calculés.

Espérons qu’au cours de l’année 2022, et malgré l’élection présidentielle, des ajustements puissent être apportés. L’année 2022 permettra au moins de voir précisément l’ampleur de ces fractions de corrections.


[1] L’article 47 de la loi de finances pour 2022 est venue supprimer cette mention, ce qui implique que les taux additionnels de foncier bâti seront à prendre en compte dans le calcul.

Principal indicateur de la richesse fiscale des collectivités territoriales, le potentiel financier est au centre de la péréquation nationale, qu’elle soit horizontale (entre collectivités) ou verticale (de l’Etat aux collectivités).

Quelle interprétation, quelle pertinence suite à la suppression de la taxe professionnelle ? Quels effets liés aux fusions d’EPCI ?

Une vidéo de Pierre-Olivier HOFER, directeur associé EXFILO

La fusion d’EPCI à fiscalité propre (communauté de communes, d’agglomération, urbaine, syndicats à contribution fiscalisée) provoque un effet qui est méconnu, sur les dotations de péréquation communales : dotation de solidarité urbaine (DSU), dotation de solidarité rurale (DSR) et dotation nationale de péréquation (DNP). Cet effet peut être décuplé si la fusion se conjugue à un passage à la fiscalité

En effet, les critères d’éligibilité et de répartition de ces dotations, le potentiel fiscal et financier, l’effort fiscal, sont calculés en fonction des taux et bases de la commune, mais aussi de son EPCI. En outre, le potentiel fiscal et financier est aussi calculé différemment suivant le régime fiscal de l’EPCI.

[citation alignement=”left”]Passage en FPU, unification des taux additionnels, nouveau périmètre de l’EPCI, autant de facteurs qui jouent sur le potentiel fiscal et financier des communes[/citation]
Dès lors, qui dit changement d’EPCI, de périmètre de l’EPCI, fusion d’EPCI, changement de régime fiscal, dit variations des dotations communales (à la hausse ou à la baisse).

 

 

Quatre cas peuvent se produire :

1/ La commune était auparavant à fiscalité additionnelle et le nouvel EPCI issu de la fusion est à fiscalité additionnelle. Ce cas est le plus simple.

  • Ici, le potentiel fiscal et financier tient compte des produits communaux et intercommunaux “territorialisés”, c’est à dire localisés sur le territoire de la commune. Il n’y aura donc pas d’effets avant / après la fusion, la commune ayant les mêmes produits territorialisés.
  • L’effort fiscal est calculé à partir des taux communaux et des taux intercommunaux. L’unification des taux additionnels conduira mécaniquement à une modification de l’effort fiscal des communes. Ceci restera sans impact sur les dotations communales si l’effort fiscal est supérieur à 1,2 (l’effort fiscal pris en compte dans le calcul des dotations est plafonné à 1,2). Par contre, les communes qui ont un effort fiscal proche de la moyenne ou proche du seuil de 85% de la moyenne risquent de perdre l’éligibilité à la dotation nationale de péréquation si elles en bénéficiaient.

2/ La commune était à fiscalité additionnelle et le nouvel EPCIissu de la fusion est à fiscalité professionnelle unique. Ce cas est celui qui génèrera le plus d’impact sur les dotations communales.

  • Le potentiel fiscal et financier ne se calcule pas de la même manière suivant que l’EPCI est à fiscalité professionnelle unique (FPU) ou à fiscalité additionnelle (FA). En effet, dans le cas de la FA, les produits intercommunaux sont territorialisés alors qu‘en FPU, les produits intercommunaux sont répartis entre les communes au prorata de la population. Ainsi, une commune à fortes bases mais faible population va bénéficier avec le passage en FPU d’une baisse de son potentiel fiscal et financier, et donc une hausse de ses dotations de péréquation. A contrario, les autres communes de son groupement risquent de récupérer dans leur potentiel fiscal et financier les bases de la première commune. Le passage en FPU conduit à une nouvelle répartition de la richesse fiscale, non plus en fonction de la localisation de cette richesse, mais en fonction de la population.
  • L’effort fiscal sera lui aussi impacté par l’unification des taux additionnels, de la même manière que pour la fiscalité additionnelle.

3/ La commune était auparavant en fiscalité professionnelle unique et le nouvel EPCI issu de la fusion est en fiscalité additionnelle.Ce cas devrait être peu fréquent.

  • Le potentiel fiscal et financier de la commune passerait d’une richesse intercommunale répartie à la population à une richesse intercommunalité localisée sur son territoire.
  • Effort fiscal : impact de l’unification des taux additionnels.

4/ La commune était auparavant en fiscalité professionnelle unique et le nouvel EPCI issu de la fusion est en fiscalité professionnelle unique

  • Le potentiel fiscal et financier de la commune sera impacté, non par le changement de calcul, mais par le changement de périmètre de l’EPCI. En effet, le poids de la commune dans la population intercommunale va varier, de même que la richesse fiscale intercommunal à répartir entre les communes membres.
  • L’effort fiscal sera impacté par l’unification des taux additionnels.

Ces impacts de la fusion ne seront pas immédiatement visible. En effet, les critères et les dotations DGF sont calculés à partir de données de l’année précédente (le potentiel fiscal est calculé à partir des bases brutes N-1). Quelles conséquences ?

Prenons le cas d’une commune qui était membre en 2013 en fiscalité additionnelle, et qui rejoint (par fusion, adhésion) un EPCI à FPU en 2014

2014 : le potentiel fiscal et financier de la commune continuera à être calculé selon les principes applicables à la fiscalité additionnelle ! Pas de changement. La richesse intercommunale est donc territorialisée.

2015 : Prise en compte du passage en fiscalité professionnelle unique. Le potentiel fiscal et financier de la commune est pour la première fois calculé selon le principes de la FPU, c’est à dire une richesse intercommunale répartie à la population !

 

Ces effets à retardement de la fusion des EPCI pourront utilement être pris en compte dans le cadre d’un pacte financier et fiscal, afin que la solidarité du territoire joue en faveur des communes qui perdraient l’éligibilité à une dotation du fait de la fusion. Vous pouvez sortir vos calculettes.