Articles sur la péréquation verticale et horizontale

[Cette disposition n’est plus d’actualité, ce projet de remplacement du critère Voirie ayant été supprimé et ne figurant pas dans la loi de finances pour 2023.]

La Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) des communes est composée de plusieurs dotations, dont la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) au sein de laquelle le critère de la longueur de Voirie est utilisé pour le calcul de l’attribution (DSR péréquation et DSR cible). Ce critère de longueur de voirie est bien connu des élus comme intervenant dans le calcul de la DGF.

Le projet de loi de finances pour 2023 supprime le critère de la longueur de voirie communale, pour le remplacer par un critère de densité. Il s’agit d’une demande faite par le Comité des Finances Locales en juin 2022, dans la mesure où, pour les communes en métropole et communautés urbaines, le transfert de voirie à l’intercommunalité occasionne des pertes de dotations. En effet, si pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération, le transfert de la compétence Voirie fait l’objet d’une mise à disposition (la voirie reste dans le patrimoine communal), ce n’est pas le cas pour les métropoles et communautés urbaines, pour lesquelles il y a véritablement transfert de patrimoine, d’où modification des longueurs de voiries communales et perte de dotations pour ces communes.

La proposition du Gouvernement est de remplacer ce critère longueur de voirie par un critère de densité et de superficie, calculé comme suit :

Superficie de la commune x Coefficient de densité x Coefficient de population

avec :

Coefficient de densité = écart de densité démographique par rapport à la moyenne des commune de la strate démographique

  = 1+ ((Population communale DGF / superficie communale) / (densité démographique moyenne de la strate), dans la limite d’un coefficient de 2

Coefficient de population = coefficient d’autant plus important que la population est importante

= 4/3 x logarithme de (population communale DGF 500), avec un minimum de 1 pour les commune de moins de 500 habitants

Ainsi, ce nouveau critère conduit à favoriser les communes dont la population rapportée à la superficie est plus importante que la moyenne des communes de même strate démographique, et dont la population est importante (car l’application du logarithme conduit à majorer plus fortement les communes les plus peuplées).

Or le critère de la longueur de voirie est un critère plutôt favorable aux communes rurales, faiblement peuplées mais étendues, et le nouveau critère de densité serait lui plus favorable à des zones plus denses donc à priori moins rurales.

A partir de la répartition de la DGF de 2022, nous avons simulé l’impact du changement de critères. Notons que le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une augmentation de 200 millions € de la Dotation de solidarité rurale, dont 60% serait fléchée vers la seconde fraction, celle impactée par la suppression du critère voirie : dans les faits en 2023, l’augmentation de l’enveloppe compensera pour partie les impacts négatifs du changement de critère, mais un peu moins de la moitié des communes perdraient encore de la dotation.

Le tableau ci-dessus présente l’impact du passage d’un critère longueur de voirie à un critère de densité démographique, hors augmentation des enveloppes afin d’observer l’influence de ce seul changement. Avec le nouveau critère de densité, les moins de moins de 1 000 habitants seraient en moyenne perdantes : une diminution de dotation de 208€ en moyenne par commune pour les communes de moins de 500 habitant, et une diminution de dotation de 954€ en moyenne pour celles comprises entre 500 et 999 habitants. Leur dotation resterait tout de même supérieur en euros par habitant aux autres communes : les communes de moins de 500 habitants reçoivent avec le critère Voirie 21€/habitant, lorsqu’elles recevraient 20,1€/habitant avec le critère densité.

Au niveau national, compte tenu du nombre important de communes de moins de 1 000 habitants, il y aurait plus de communes perdantes à l’introduction du critère densité en lieu et place du critère voirie, que de communes gagnantes.

L’examen par EPCI d’appartenance des communes permet de montrer que les communes membres de communautés d’agglomération et de communautés urbaines seraient en moyenne perdantes au changement de critère, ce qui est étonnant vu les objectifs de la réforme (les 4 communes isolées, c’est à dire sans EPCI d’appartenance, étant des communes insulaires).

Notons toutefois que les variations portent sur de faibles montants en moyenne.

C’est ainsi que prises individuellement, certaines communes ont des pertes bien plus importantes : plusieurs communes de moins de 500 habitants en zone de montagne, perdraient dans nos projections près de 15 000€ de dotations du fait du changement de critère.

Autres exemple parmi les plus importants, la commune d’Ussel, en Corrèze, proche des 10 000 habitants, perdrait 42 000€ du fait du changement de critère, avant majoration de l’enveloppe (et perdrait 34 000€ avec la majoration de l’enveloppe).

En période de forte inflation et de tensions budgétaires, c’est un mauvais signal pour le monde rural.

La modification des modalités de calcul des critères de péréquation, potentiels fiscaux, financiers, efforts fiscaux, entrera bien en vigueur au 1er janvier 2022.

Si la rédaction issue de la LF 2021 permet d’intégrer le nouveau panier fiscal des communes et EPCI, un point nous interpelle pour le mode de calcul des potentiels fiscaux et financiers des communes, et n’est pas modifié par la rédaction de la loi de finances pour 2021.

En effet, pour la prise en compte de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans le potentiel fiscal et financier, l’article L.2334-4 du code général des collectivités territoriales issue de la loi de finances pour 2021 (donc celui qui entrera en application au 01/01/2022), précise au point I que sont pris en compte les deux produits suivants :

Premier produit FB

« 1° bis Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 multipliée par le coefficient correcteur mentionné au B du IV de l’article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ; ».

Ainsi, le produit de foncier bâti pour le potentiel fiscal est valorisé à hauteur de la somme taux communal et taux départemental reçu en compensation de la suppression de la taxe d’habitation, pondéré par le coefficient correcteur qui vise à ce que le « nouveau » produit de foncier bâti ne soit pas inférieur au produit de taxe d’habitation sur les résidences principales supprimé pour la commune.

Le produit de foncier bâti et d’ex – produit de taxe d’habitation est donc valorisé directement dans le potentiel fiscal, au taux communal, alors que précédemment, taxe d’habitation et taxe sur le foncier bâti étaient valorisés aux taux moyen national.

Second produit FB

1° ter Le produit déterminé par l’application aux bases communales d’imposition de taxe foncière sur les propriétés bâties de la différence entre le taux moyen national communal[1] d’imposition de cette taxe et la somme des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties communal et départemental appliqués sur le territoire de la commune en 2020 ; »

Deuxièmement, le premier produit est « corrigé » de la différence entre le taux moyen national de foncier bâti et le « nouveau » taux communal de foncier bâti (avec l’ex-taux départemental). Cette procédure vise à pallier le fait que dans le premier terme, c’est le taux communal qui est pris en compte.

Mais le second produit mesure l’écart entre le taux moyen national de foncier bâti (communal et ex départemental) et le taux « facial » communal (avec l’ex -taux départemental). Or, la commune perçoit un produit et un niveau de richesse pondéré par le coefficient correcteur.

La logique du calcul proposé est claire : le second produit vise à ajouter au premier, l’écart entre le taux moyen national et le « nouveau » taux communal 2020. Toutefois, en n’appliquant pas le coefficient correcteur (ni communal ni moyen national), on introduit un biais et une différence par rapport aux potentiels fiscaux et financiers 2020. Car en moyenne au niveau national, le coefficient correcteur n’est pas égal à 1 : le produit de foncier bâti départemental n’a pas représenté strictement le produit de taxe d’habitation communal supprimé.

Le mode de calcul du potentiel fiscal « foncier bâti » est au terme de ces deux :

Premier produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020) x coefficient correcteur

+ Second produit : Bases brutes communales de Foncier bâti N-1 x (Taux moyen national Foncier bâti N-1 – Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental de Foncier bâti 2020)

Soit, écrit autrement :

Bases brutes communales FB N-1 x [ Taux moyen national Foncier Bâti N-1 + (Taux communal Foncier bâti 2020 + Taux départemental Foncier bâti 2020) x (coefficient correcteur – 1) ]

Le taux moyen national de Foncier bâti est corrigé du supplément ou de la minoration au titre du coefficient correcteur appliqué au taux communal. En moyenne, on a donc le taux moyen national. Mais il eut fallu corriger aussi le taux moyen national du niveau du coefficient correcteur moyen national.

Nos simulations témoignent que les écarts à la moyenne des potentiels fiscaux et financiers de l’ensemble des communes sont impactés avec des variations souvent sensibles. Pour les EPCI, les variations des écarts à la moyenne des potentiels fiscaux sont bien plus modestes.

Notons toutefois, qu’un mécanisme de correction est prévu, afin de lisser dans le temps les effets de cette suppression : les potentiels financiers et fiscaux 2022 seront corrigés d’une fraction permettant de neutraliser les effets de la suppression de la taxe d’habitation (et de la réduction de moitié des valeurs locatives des locaux industriels). Cette fraction sera intégrée en totalité dans les potentiels fiscaux et financiers pour 2022, puis en réduction les années suivantes : 90% en 2023, 80% en 2024, puis -20% par an, jusqu’à une absence de fraction de correction à partir de 2028.

Le mode de calcul précis de ces fractions de corrections, qui doivent neutraliser pour 2022, les écarts, doit être précisé par un décret. Nous ne savons pas pour l’heure comment ils seront calculés.

Espérons qu’au cours de l’année 2022, et malgré l’élection présidentielle, des ajustements puissent être apportés. L’année 2022 permettra au moins de voir précisément l’ampleur de ces fractions de corrections.


[1] L’article 47 de la loi de finances pour 2022 est venue supprimer cette mention, ce qui implique que les taux additionnels de foncier bâti seront à prendre en compte dans le calcul.

L’article 58 du projet de loi de finances pour 2021 acte et organise, la neutralisation des effets de la suppression de la taxe d’habitation et de la réduction de moitié des valeurs locatives des établissements industriels sur les critères de répartition des dotations de péréquation (potentiel fiscal, potentiel financier, effort fiscal, potentiel fiscal agrégé, effort fiscal agrégé).

Si l’on devait en une seule phrase résumer ces dispositions, nous pourrions citer celle-ci de l’article 58 PLF 2021  : « Les indicateurs financiers [potentiels fiscaux, financiers, effort fiscal, potentiel financier agrégé, effort fiscal agrégé] de chaque commune ou ensemble intercommunal sont, chacun, majoré ou minoré d’une fraction de correction visant à égaliser les variations de ces indicateurs liés : … ».

Les conditions précises de calcul seront déterminées par décret en tenant compte de la différence de produits pris en compte pour le calcul des critères en 2021 et 2022 (recettes 2020 et 2021). Schématiquement, il s’agira de recalculer les critères 2021 sur la base des dispositions de 2022, de constater un écart, et d’intégrer cet écart dans le calcul des critères 2022 pour neutraliser l’impact de la suppression de la TH et de la réduction de moitié des bases des établissements industriels.

A noter que la loi prévoit d’ores et déjà, la suppression progressive de ces ajustements : « En 2023, les indicateurs financiers […] seront chacun majorés ou minorés du produit des fractions de correction […] calculées en 2022 par un coefficient de 90%. En 2024, ce coefficient est égal à 80%, puis il diminue de 20 points par an au cours des quatre exercices suivants. ».

Bref, il ne s’agit pas de la refonte attendue des indicateurs, simplement d’un lissage dans le temps des effets. Une réforme a minima en l’état, et qui laisse entièrement ouverte la question des impacts de la suppression TH et de la réduction de moitié des bases des établissements industriels, sur les critères de répartition des collectivités et donc leurs dotations.

Ces modifications sur les indicateurs financiers n’entreront en vigueur qu’en 2022, ce qui laisse encore l’année 2021 pour procéder à des ajustements ou discussions avec l’Etat.

Principal indicateur de la richesse fiscale des collectivités territoriales, le potentiel financier est au centre de la péréquation nationale, qu’elle soit horizontale (entre collectivités) ou verticale (de l’Etat aux collectivités).

Quelle interprétation, quelle pertinence suite à la suppression de la taxe professionnelle ? Quels effets liés aux fusions d’EPCI ?

Une vidéo de Pierre-Olivier HOFER, directeur associé EXFILO

  1. Une enveloppe unique, quelle que soit la catégorie de l’EPCI (communauté de communes, d’agglomération, urbaine, métropole). La mise en place d’une dotation unique bénéficie clairement aux communautés de communes qui avaient jusque-là des dotations à l’habitant inférieures : les CC à fiscalité additionnelle passeraient d’une dotation moyenne de 8€/hab en 2018 à 10,4€/hab en 2019 et 14,3€/hab en 2023 ; les CC à FPU passeraient d’une dotation moyenne de 14€/hab en 2018 à 15,3€/hab en 2019, et 19,2€/hab en 2023
  2. Un complément de 5€ par habitant contre-péréquateur. le complément est attribué à tous les EPCI qui n’ont pas eu en 2018 une dotation par habitant atteignant ce niveau. Or qui s’est trouvé dans ce cas de figure ? 2/3 des EPCI dont la dotation d’intercommunalité n’a pas atteint ce niveau sont des intercommunalités dont le potentiel fiscal est supérieur à la moyenne. Une bonne partie est aussi constitué de communauté de communes à fiscalité additionnelle (à faible dotation donc) et à fort prélèvement au titre de la contribution au redressement des finances publiques. Or le législateur avait toujours privilégié jusque-là les catégories les plus fiscalement intégrées, celles en fiscalité professionnelle unique.
  3. Une mutualisation de la contribution au redressement des finances publiques. La contribution au redressement des finances publiques (CRFP), qui se traduisait par un prélèvement su la dotation d’intercommunalité en fonction des recettes de fonctionnement, est intégrée dans l’enveloppe nationale et vient donc la diminuer. Au niveau national, la CRFP représentait 55% de la dotation d’intercommunalité : prélever la CRFP sur l’enveloppe nationale revient à affecter à tous les EPCI cette quote-part de 55%. Les EPCI dont la CRFP représentait plus de 55% de leur dotation d’intercommunalité sont avantagés : or il s’agit souvent d’intercommunalités à fortes ressources (richesse fiscale notamment) ou à faible dotations (et faible intégration fiscale comme les communautés de communes à fiscalité additionnelle)
  4. Une « course » au CIF pour les communautés d’agglomérations, communautés urbaines et métropoles. Les CA-CU-MET bénéficient d’une garantie de stabilité de leur dotation d’intercommunalité si leur CIF est au moins égal à 35%. En 2019, c’est 60% des CA, 10 CU sur 11 et 21 métropole sur 22, qui ont un CIF supérieur à 35%. Inévitablement, les communautés qui n’atteignent pas encore ce CIF de 0,35 vont prendre des mesures (prises de compétences, pacte financier, réduction d’AC ou DSC) pour atteindre ce seuil. Or comment les dotations des communautés de communes pourront-elles progresser, sans abondements extérieurs, si les dotations des CA-CU-MET sont figées ?
  5. Une progression des dotations limitée à +10%/an. Pour une dotation d’intercommunalité atteignant 500k€, comme souvent pour les communautés de communes, cela représente une augmentation annuelle de 50k€/an (plus les années suivantes), un enjeu intéressant mais très étalé dans le temps
  6. Une réduction de l’importance du CIF pour les communautés de communes. Leur dotation va dans la très grande majorité, progresser « naturellement » du fait de la réforme, par conséquent le CIF perdra de son importance : une fois que l’on a une dotation qui progresse mais est plafonnée à +10%/an, quel intérêt de faire croître son CIF puisque cela n’aura pas d’effet visible à court-moyen terme sur la dotation d’intercommunalité ?
  7. La prise en compte des redevances assainissement (2020) et eau (2026) dans le CIF des CC.

La réforme de la dotation d’intercommunalité entre en vigueur au 1er janvier 2019, avec l’article 250 de la loi de finances pour 2019. Plusieurs changements d’importance interviennent :

  • La dotation spontanée (dotation perçue avant mécanismes de garanties et d’écrêtement) n’est plus composée que de deux parts : la dotation de base et la dotation de péréquation. La dotation de bonification des communautés de communes à fiscalité professionnelle unique (qui obligeait celles-ci à prendre un nombre de compétences toujours plus important afin de maintenir l’éligibilité à cette dotation) est supprimée. Tout comme la dotation de majoration des communautés de communes à fiscalité additionnelle (dont elles bénéficiaient automatiquement).
  • Comme auparavant, la dotation spontanée est déterminée par l’utilisation de critères propres à chaque EPCI (population, CIF, potentiel fiscal, revenu par habitant) et de valeurs de point.  La différence est que les valeurs de points sont désormais identiques pour tous les EPCI, quel que soit leur catégorie d’appartenance (CC à FPU, CC à FA, CA, CU, Métropoles). Cependant, le calcul de la dotation de péréquation fait encore jouer la catégorie d’appartenance de l’EPCI, avec le critère potentiel fiscal, apprécié en fonction de l’écart à la moyenne de la catégorie. Signalons également l’ajout du critère « revenu par habitant » dans le calcul de cette dotation de péréquation, qui repose désormais sur 4 critères de calcul :  la population, le CIF, le potentiel fiscal et le revenu par habitant. La dotation est base est toujours calculée de la même façon (critères CIF et population).
  • Après calcul de la dotation spontanée, des mécanismes de garanties et d’écrêtement sont appliquées, comme auparavant. Ainsi, l’ensemble des EPCI sont assurés de percevoir au moins 95% de la dotation à l’habitant perçue l’année précédente (100% pour les 2 années suivant une fusion ou un changement de catégorie). Et aucun EPCI ne pourra percevoir une dotation supérieure à 110% de celle perçue l’année précédente (sauf en cas de changement de catégorie ou de création ex-nihilo). Trois types de garanties spécifiques assurent à certains EPCI de percevoir une dotation par habitant au moins égale à celle perçue l’année précédente :

– Pour les métropoles, CU et CA dont le CIF est supérieur à 0,35 (voir cet article sur les enjeux de CIF) ;

– Pour les CC dont le CIF est supérieur à 0,50 ;

– Pour les EPCI dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à 60 % du potentiel fiscal moyen par habitant des EPCI appartenant à la même catégorie.

  • Des plafonds et majorations ont été fixés concernant le CIF : plafonnement du CIF à 0,6 pour tous les EPCI, et majoration de 10% pour le CIF des métropoles. Ce plafonnement peut s’entendre dans la mesure où l’importance du CIF ne reflète pas que l’intégration fiscale à proprement parler. En effet, les territoires à fortes bases/fiscalité professionnelle et faibles bases/fiscalité ménages, sont naturellement favorisés en FPU puisque la part de fiscalité professionnelle est supérieure à celle des ménages. L’effet de levier d’un transfert de compétences sur le CIF est alors plus important que dans le cas de faible fiscalité professionnelle/forte fiscalité ménages.

Les EPCI qui avaient une minoration qui représentait plus de 55% de leur dotation d’intercommunalité (avant minoration, moyenne nationale) sont favorisés.

  • La minoration de la DGF (contribution au redressement des finances publiques) est intégrée au sein de la dotation d’intercommunalité (les valeurs de points sont impactées en conséquence) : le nouveau montant réparti de la dotation d’intercommunalité se base sur le montant 2018 après minoration. Ceci implique que les EPCI qui avaient une minoration qui représentait plus de 55% de leur dotation d’intercommunalité (avant minoration, moyenne nationale) sont favorisés puisqu’avec la réforme tout le monde sera impacté égalitairement. Ce sont principalement les communautés de communes à fiscalité additionnelle et les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique (sans bonification) qui seront les grandes bénéficiaires de cette mesure : en effet, la minoration représentait en moyenne respectivement 78% et 62% de leur dotation d’intercommunalité 2018 !
  • Remarque : pour les EPCI dont la minoration était supérieure à la dotation d’intercommunalité, un prélèvement sur les douzièmes mensuels était opéré. Ce prélèvement sur fiscalité est maintenu à l’identique à compter de 2019, pour les EPCI concernés.  
  • Un « complément » de dotation est mis en place à compter de 2019, afin de permettre à tout EPCI d’avoir un minimum de 5€ par habitant (avec une condition à respecter :le potentiel fiscal de l’EPCI doit être inférieur au double de la moyenne nationale de la catégorie d’appartenance). Si un EPCI a une dotation inférieure à 5€ par habitant, c’est soit qu’il est particulièrement bien doté en bases fiscales, soit qu’il a une minoration importante. Et ce sont là aussi les communautés de communes à fiscalité additionnelle et les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique sans bonification qui en sont les grandes bénéficiaires.
  • Enfin, le calcul du CIF des communautés de communes va prochainement intégrer les redevances assainissement et eau, respectivement en 2020 et 2026. (voir cet article)

Quelles conséquences ? Nous avons simulé l’impact de la réforme de la dotation d’intercommunalité sur les 1266 EPCI existants au 1er janvier 2018, et sur la base des critères de répartition 2018. Il en ressort les constats suivants :

  • Puisque l’on unifie la dotation par habitant, les communautés de communes à fiscalité additionnelle sont les grandes gagnantes de cette réforme : leur dotation moyenne passerait ainsi de 8€/hab. en 2018 à 10,6 €/hab. en 2019 (soit une progression moyenne de +33% en 2019). Cette forte progression s’explique aussi par le complément de 5€ par habitant attribué en 2019 aux EPCI ayant une faible dotation d’intercommunalité 2018 (après minoration) : ce complément bénéficie essentiellement aux CC à FA.  
  • Les communautés de communes FPU seraient également gagnantes à cette réforme, mais à un niveau nettement moins élevé que les CCFA : leurs dotations passeraient en moyenne de 14€/hab. en 2018 à 15,6€/hab. en 2019 (soit une progression moyenne de +11%). L’unification des valeurs de point et le complément de 5€ explique cette progression.
  • La dotation d’intercommunalité des communautés d’agglomération progresserait modestement : de 22,4€/hab. en 2018, elle passerait à 23,1€/hab. en 2019 (+3%).
  • La catégorie des métropoles et communautés urbaines auraient une stabilité dans leur ensemble (28,1€/hab. en 2018 à 28,3€/hab. en 2019) entre 2018 et 2019, avec toutefois une diminution pour les communautés urbaines : elles perdraient 0,6€/hab. de dotation en 2019.

Et ces progressions et diminutions seraient appelées à se poursuivre au cours des années suivantes, à législation constante.

La réforme de la dotation globale de fonctionnement, inscrite à l’article 79 du projet de loi de finances pour 2019 présenté par le Gouvernement le 24 septembre dernier, contient une mesure d’ampleur qui avance masquée. En effet, les variations de dotations d’intercommunalité liées à la réforme sont principalement dues à deux effets.

Une enveloppe unique quelle que soit la catégorie de l’EPCI

Tout d’abord, la constitution d’une enveloppe unique de répartition, quelle que soit la catégorie de l’EPCI, conduit à ce que les communautés de communes, à fiscalité additionnelle (CCFA) principalement mais aussi à fiscalité professionnelle unique (CCFPU), soient les grandes gagnantes de la réforme proposée. Et pour cause : les CCFA passeraient d’une dotation moyenne à l’habitant de 8,0€ en 2018 (après minoration) à 10,7€ en 2019 et 14,3€ en 2023 ! La progression est à peine moins importante pour les CCFPU qui passeraient d’une dotation 2018 (après minoration) de 14,0€ par habitant à 15,6€ par habitant en 2019 puis 19,2€ par habitant en 2023. Et ces progressions continueraient les années suivantes. Mécaniquement, les catégories d’EPCI qui bénéficiaient de dotations à l’habitant plus fortes sont pénalisées par la réforme, notamment les métropoles et communautés urbaines. Ces dernières ne sont « sauvées » que grâce à une garantie de stabilisation de la dotation lorsque le CIF est supérieur à 40%, qui permet de stabiliser les dotations des communautés urbaines hormis Grand Paris Seine Oise et Grand Poitiers, dont les dotations diminueraient de 5% par an pendant longtemps.

Mais une mutualisation de la contribution au redressement des Finances Publiques

Mais un autre effet influe de manière importante la répartition : il n’y a plus de contribution individualisée au redressement des finances publiques (CRFP) ! En effet, la dotation d’intercommunalité 2019 se base sur la dotation 2018 après minoration, et les articles relatifs à la minoration sont supprimés. Quelles conséquences ? De manière très simple, cela revient à considérer que tous les EPCI subissent dorénavant la même quote-part de minoration sur leur DGF, quelles que soient leurs ressources. Au niveau national en 2018, la CRFP représentait 55% de la dotation d’intercommunalité. Prélever la minoration sur l’enveloppe nationale revient à appliquer à tous les EPCI cette quote-part de 55%. Donc les EPCI dont la minoration représentait plus que ces 55% de leur dotation d’intercommunalité sont avantagés. Un sacré recul par rapport au principe initial de prélèvement en fonction de la richesse ! De ce fait, nombre de communautés bien dotées fiscalement, sont de grandes gagnantes à la réforme !

Et un complément des 5€/hab contre-péréquateur

Enfin, le complément de dotation, pour les EPCI qui ont eu en 2018 une dotation inférieure à 5€ par habitant, joue un rôle contre-péréquateur. Quels sont les EPCI bénéficiaires ? Ceux-dont la minoration était particulièrement importante au regard de leur dotation d’intercommunalité, c’est-à-dire pour les 2/3 d’entre eux, des EPCI dont le potentiel fiscal est supérieur à la moyenne. Leur attribuer une dotation répond probablement à un intérêt « technique » (sans cela, avec le mécanisme d’écrêtement existant à +10%, ces EPCI n’auraient jamais de dotation, puisqu’une augmentation de 10% d’une dotation nulle ou très faible, ne fait pas grand-chose), mais donne un mauvais signal quant à l’objectif péréquateur de cette réforme.

L’article 79 du projet de loi de finances pour 2019 lance le chantier de la réforme de la dotation d’intercommunalité, applicable au 1er janvier 2019. Plusieurs changements d’importance interviennent :

  • Fin de la bonification de la DGF des communautés de communes à fiscalité professionnelle unique, qui obligeait celles-ci à prendre un nombre de compétences toujours plus important afin de maintenir l’éligibilité à cette dotation,
  • Une valeur de point unique quelle que soit la catégorie de l’EPCI : cela veut dire que les EPCI seront comparés entre eux, non pas directement mais au travers de l’écart à la moyenne de leur catégorie. En effet, le critère du potentiel fiscal, est encore apprécié au regard de la moyenne de la catégorie de l’EPCI,
  • L’introduction dans la dotation de péréquation du critère du revenu par habitant,
  • Incorporation de la minoration de la DGF (contribution au redressement des finances publiques) au sein de la dotation d’intercommunalité : le nouveau montant réparti de la dotation d’intercommunalité se base sur le montant 2018 après minoration. Ceci implique que les EPCI qui avaient une minoration qui représentait plus de 55% de leur dotation d’intercommunalité (avant minoration, moyenne nationale) sont favorisés puisqu’avec la réforme tout le monde sera impacté égalitairement. Ce sont principalement les communautés de communes à fiscalité additionnelle et les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique (sans bonification) qui seront les grandes bénéficiaires de cette mesure : en effet, la minoration représente en moyenne respectivement 78% et 62% de leur dotation d’intercommunalité 2018 !
  • Un « complément » de dotation afin de permettre à tout EPCI d’avoir un minimum de 5€ par habitant. Si un EPCI a une dotation inférieure à 5€ par habitant, c’est soit qu’il est particulièrement bien doté en bases fiscales, soit qu’il a une minoration importante. Et ce sont là aussi les communautés de communes à fiscalité additionnelle et les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique sans bonification qui en sont les grandes bénéficiaires. A noter malgré tout que le prélèvement sur les douzièmes mensuels est maintenu.
  • Le CIF est plafonné à 0,6 pour le calcul de la DGF, et il est majoré de 20% pour les métropoles : ce plafonnement peut s’entendre dans la mesure où l’importance du CIF ne reflète pas que l’intégration fiscale à proprement parler. En effet, les territoires à fortes bases/fiscalité professionnels et faibles bases/fiscalité ménages, sont naturellement favorisés en FPU puisque la part de fiscalité professionnelle est supérieure à celle des ménages. L’effet de levier d’un transfert de compétences sur le CIF est alors plus important que dans le cas faibles fiscalité professionnel/forte fiscalité ménages.

 

Quelles conséquences ? Nous avons simulé l’impact de la réforme de la dotation d’intercommunalité, avec les critères de répartition 2018, pour les 1266 EPCI existants au 1er janvier 2018. Il en ressort que :

  • Puisque l’on unifie la dotation par habitant, les communautés de communes à fiscalité additionnelle sont les grandes gagnantes de cette réforme : leur dotation moyenne passerait ainsi de 8€/hab en 2018 à 10,7€/hab en 2019 (soit +34% dès 2019 en moyenne),
  • Les communautés de communes FPU auraient une dotation en progression, à un rythme nettement moins sensible que les CCFA : elles passeraient en moyenne de 14€/hab en 2018 à 15,6€/hab en 2019,
  • La dotation d’intercommunalité des communautés d’agglomération progresserait modestement : de 22,4€/hab en 2018, elle passerait à 23,0€/hab en 2019,
  • La catégorie des métropoles et communautés urbaines auraient une stabilité dans leur ensemble (28,1€/hab en 2018 à 28,2€/hab en 2019) entre 2018 et 2019, avec toutefois une diminution pour les communautés urbaines : elles perdraient 0,7€/hab de dotation en 2019. Il faut noter que sur les communautés urbaines, ce sont surtout les CU Grand Paris Seine Oise, et Grand Poitiers qui seraient perdantes, avec une dotation à l’habitant qui diminuerait de -5%/an sur la période 2019/2023, et les CU Grand Reims et Caen la Mer auraient une diminution les premières années, de -6€/hab en 2019 tout de même. En effet, ces 4 communautés urbaines ont un coefficient d’intégration fiscale inférieur à 0,4, niveau minimal pour bénéficier de la garantie CIF. Les 7 autres CU ont un CIF supérieur à 0,4 et bénéficient donc d’une dotation stable en euros par habitant,
  • La progression de la dotation d’intercommunalité 2019 serait « boostée » par l’attribution ponctuelle d’un complément de 5€ par habitant pour les EPCI à faible dotation d’intercommunalité (après minoration).

Réforme DGF 2019 montants - EXFILO

Réforme DGF 2019 montants – EXFILO

Au total 156 EPCI auraient une dotation d’intercommunalité plus faible en 2019 qu’en 2018 :

  • Une communauté de communes à fiscalité additionnelle serait perdante, la CC Aure-Louron,
  • 156 EPCI seraient « perdants » en 2019 (et les années suivantes, ce chiffre augmentant légèrement), il s’agit principalement de communautés d’agglomération et de communautés de Communes à FPU. Leur décompte en fonction de l’importance de la réduction de leur dotation en euros par habitant est présenté ci-dessous :

Réforme DGF 2019 - EXFILO

Réforme DGF 2019 – EXFILO

La circulaire de répartition de la dotation d’intercommunalité 2018 est parue ce 30 mai (à télécharger ici).
La masse de dotation d’intercommunalité à répartir entre les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique (CCFPU) est restée stable en 2018 (685M€ en 2018 contre 686M€ en 2017), de même que la masse de dotation d’interco à répartir entre les CC à fiscalité additionnelle (103M€ en 2018 et 2017).
Par contre, dans le même temps, les valeurs de points qui servent à répartir la totalité de l’enveloppe entre tous les bénéficiaires de chaque catégorie se sont, elles, effondrées pour les CC FPU :
  • Les valeurs de points de la dotation d’intercommunalité des CC à fiscalité professionnelle unique accusent de fortes baisses (dotation de base : 9,8 en 2018 contre 17,03 en 2017 ; dotation de péréquation : 22,4 en 2018 contre 38,16 en 2017).
  • Dans le même temps, les valeurs de points de la dotation d’intercommunalité des communautés de communes à fiscalité additionnelle ont elles fortement augmenté (dotation de base : 10,54 en 2018 contre 0,83 en 2017 ; dotation de péréquation : 23,21 en 2018 contre 1,83 en 2017).
Ceci témoigne du fait qu’un nombre important de CC FA a dû changer de catégorie et passer en FPU en 2018. Les enveloppes de chaque catégorie sont étanches entre elles. Les autres critères, type CIF moyen ou potentiel fiscal moyen, n’ont que peu varié.
Nous nous retrouvons avec une difficulté qu’ont connu les communautés d’agglomération en 2016, où la création des métropoles de Paris et Marseille avait conduit à siphonner leurs dotations, et leurs valeurs de point avaient été divisées par 2.
Seules les garanties ont permis de maintenir les dotations à l’habitant. La DGF est à bout de souffle et c’est cette fois-ci définitivement la fin des incitations de dotations.

La Direction générale des collectivités locales a publié les dotations 2018 des communes et intercommunalités sur son site internet (lien ici). Ces informations permettent de prendre connaissance des montants versés par l’Etat aux collectivités territoriales.

 

La masse globale de la dotation d’intercommunalité des communautés d’agglomération – Source – DGCL

Les dotations d’intercommunalité des communautés d’agglomération sont en hausse en 2018 de 0,3%, soit 1,72M€. La hausse de la dotation d’intercommunalité impacte fortement les communautés d’agglomération regroupant jusqu’à 100.000 habitants (+5,7% pour les communautés d’agglomération de moins de 50.000 habitants et +7,4% pour celles comprises entre 50.000 et 100.000 habitants). Pour cette strate de population, elles étaient au nombre de 128 en 2017 et sont au nombre de 131 en 2018 .

Une baisse de dotation d’intercommunalité est à noter pour les communautés d’agglomération de plus de 100.000 habitants (baisse importante pour les dotations de plus de 300.000 habitants, -20.7%, avec le passage en métropole au 1er janvier 2018 de Toulon Provence Méditerranée).

 

La dotation d’intercommunalité à l’habitant des communautés d’agglomération – Source – DGCL

La dotation d’intercommunalité par habitant diminue pour toutes les strates de population des communautés d’agglomération sauf pour celles comprises entre 50.000 et 100.000 habitants (du fait principalement de la création de Haut-Bugey Agglomération au 1er janvier 2018). La diminution la plus forte est à noter pour les communautés d’agglomération de moins de 50.000 habitants.