Articles sur la péréquation verticale et horizontale

Pour les communautés de communes en fiscalité professionnelle unique, le travail de réflexion autour de la redéfinition des compétences communautaires dans le cadre de fusion d’EPCI doit à notre sens débuter par la détermination des compétences requises pour que le territoire continue à percevoir une DGF bonifiée en 2018 (et au-delà).

Pour rappel, une réforme de la DGF était (est) toujours prévue pour 2018 et pourrait venir supprimer cette bonification de la dotation d’intercommunalité ou remettre en cause son mode de calcul. Mais en l’absence de projet de réforme, il nous semble indispensable de se fixer ce premier objectif, pour l’année 2018.

C’est l’article L.5214-23-1 du CGCT, dans sa version en vigueur au 01/01/2018, qui dresse le nombre et la liste des compétences éligibles pour bénéficier d’une bonification de la dotation d’intercommunalité en 2018 (et au-delà): il faudra ainsi que les communautés de communes exercent 9 des 12 compétences obligatoires et optionnelles listées dans cet article, avec des libellés de compétences qui devront être strictement identiques à ceux détaillés dans cet article (sinon ces compétences ne seront pas prises en compte).

Précisons ici un élément important : les compétences obligatoires et optionnelles que doivent exercer les communautés de communes sont détaillées à l’article L.5214-16 du CGCT. Ainsi, toutes les communautés de communes ont dû reprendre dans leur statut, en 2017, l’ensemble des compétences obligatoires listées dans cet article, en respectant à la lettre les libellés proposés. Et elles doivent également exercer au minimum 3 des compétences optionnelles qui sont listées dans cet article, en reprenant là encore dans leurs statuts les libellés de ces compétences, tel que rédigés dans cet article. Cet élément aura son importance dans notre analyse des compétences nécessaires pour bénéficier de la DGF bonifiée.

Le tableau ci-dessous présente les 12 compétences obligatoires et optionnelles listées à l’article L.5214-23-1 du CGCT et qui peuvent déclencher l’éligibilité à la bonification de la dotation d’intercommunalité, sous réserve d’en exercer au moins 9, à partir de 2018.

Compétences pour la DGF bonifiée

Compétences pour la DGF bonifiée

Avant de faire le point sur ces compétences optionnelles, une compétence obligatoire doit cependant faire l’objet d’une précision importante : la compétence aménagement de l’espace. En effet, dans l’article L.5214-23-1 du CGCT cette compétence est précisément rédigée de la façon suivante :  « En matière d’aménagement de l’espace communautaire : schéma de cohérence territoriale et schéma de secteur ; à compter du 1er janvier 2018, plan local d’urbanisme, document d’urbanisme en tenant lieu et carte communale ; zones d’aménagement concerté d’intérêt communautaire ; ». Afin d’être comptabilisé pour la DGF bonifiée, il faudra donc qu’une communauté de communes à FPU exerce la compétence PLUI (que cette compétence n’ait pas été rejeté par la minorité de blocage des conseils municipaux) ainsi que la compétence Zones d’Aménagement Concerté. Dans le cas contraire, la compétence Aménagement de l’espace ne sera pas retenue comme une des compétences prises en compte pour déterminer l’éligibilité à la DGF bonifiée.

 

Dans le cas d’EPCI issu de fusion au 1er janvier 2017, c’est le conseil communautaire qui devra décider, parmi les compétences exercées par les EPCI préexistants, celles qui seront restituées aux communes. Cette décision devra être prise avant le 31/12/2017, par simple délibération du conseil communautaire, à la majorité des suffrages exprimés. Les communes ne seront donc pas amenées à se prononcer sur cette redéfinition des compétences communautaires.

Les dotations de péréquation (dotation de solidarité rurale DSR, dotation nationale de péréquation DNP et dotation de solidarité urbaine DSU) perçues par les communes membres d’une communauté en régime de fiscalité professionnelle unique (FPU) vont être impactées en cas de regroupement d’EPCI.

Deux critères principaux sont utilisés pour déterminer l’éligibilité à ces dotations et le niveau des montants attribués (hormis la population et les valeurs de point) : il s’agit du potentiel financier par habitant et de l’effort fiscal.

Or, les valeurs de ces deux critères seront modifiées en cas de fusion de groupements.

 

1- Le potentiel financier par habitant (PF/hab)

Le potentiel financier par habitant a pour finalité de mesurer la richesse fiscale potentielle de la commune et pouvoir ainsi la comparer aux autres communes appartenant à la même strate.

Une part importante du potentiel financier par habitant des communes en régime de fiscalité professionnelle unique est calculé à partir des produits de fiscalité professionnelle perçus par l’EPCI et ventilés au prorata de la population de chaque commune membre. C’est cette part qui va être principalement impactée par la fusion :

En effet, en régime de FPU, le PF/hab. est constitué :

  • d’une « part fixe » : ce sont les ressources directes de la commune (bases ménages X taux moyens nationaux + DRCTP + FNGIR + AC). Elles ne sont pas impactées par la fusion, sauf l’AC perçue par la commune,
  • d’une part « variable » : produits de fiscalité professionnelle perçus par l’EPCI (CFE, CVAE, IFER, TASCOM, FNGIR et DRCTP principalement) et ventilés au prorata de la population de chaque commune. C’est cette part variable qui va être principalement impactée par une fusion d’EPCI, celle-ci venant modifier le volume des produits et le poids des populations communales. Notons là aussi que le solde total des AC (AC perçues ou versées par l’EPCI aux commmunes) fait partie de cette part variable.

 

2) L’effort fiscal

L’effort fiscal est utilisé pour mesurer la pression fiscale ménages consolidée sur le territoire de la commune (pression fiscale consolidée = prise en compte des taux communaux et communautaires). C’est la variation de la pression fiscale communautaire, résultant de la fusion, qui va impacter ce critère : suite à la fusion, de nouveaux taux communautaires s’appliqueront sur le territoire des communes membres, et viendront modifier leur effort fiscal :

  • L’effort fiscal augmentera en cas de hausse de la pression fiscale communautaire sur les trois taxes, suite à la fusion (taux EPCI issu de la fusion supérieurs au taux pratiqués par l’ancien EPCI auquel appartenait la commune). Mais cette hausse de l’effort fiscal jouera positivement sur l’éligibilité aux dotations et sur le calcul des montants attribués (avec cependant un  plafonnement de l’effort fiscal à 1,2),
  • L’effort fiscal diminuera en cas de baisse de la pression fiscale communautaire sur les trois taxes, suite à la fusion : cela pourrait impacter négativement le montant des dotations concernées, voire remettre en cause l’éligibilité à la  part principale de la DNP.

 

3) Deux autres éléments pourront impacter les dotations communales, en lien direct avec une fusion d’EPCI :

  1. Les transferts ou restitution de compétences suite à la fusion pourraient impacter les attributions de compensation (AC) des communes et modifier par la même :
    • le calcul de la minoration de DGF,
    • le potentiel financier de la commune (prise en compte des AC dans le calcul de la part fixe et variable du potentiel financier communal, cf. paragraphe précédent sur le potentiel financier).
  2. L’éligibilité et le calcul des montant de la part majoration de la DNP repose principalement sur le niveau des produits post-TP (CFE, CVAE, IFER, TASCOM) de l’EPCI, ventilé au prorata de la population de chaque commune membre. Une fusion avec un ou plusieurs EPCI va modifier le volume et la répartition à la population de ces produits (exactement comme pour la part variable du potentiel financier),

La subrogation de l’article 150, lève les incertitudes qui pesaient sur les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique éligibles à la DGF bonifiée.

Celui-ci supprimait, à compter du 1er janvier 2017, l’article L. 5214-23-1 du CGCT, qui aménageait le statut des communautés de communes à DGF bonifiée et définissait les conditions d’éligibilité des communautés de communes à la DGF bonifiée.

Jusqu’au 31 décembre 2016, il convenait pour un EPCI de justifier l’exercice d’au moins 4 parmi 8 groupes de compétences énumérées dans ce même article pour bénéficier de la DGF bonifiée. Par un amendement[1], l’Assemblée nationale porte ce nombre à 6 parmi 11 en 2017 (initialement 6 parmi 12)[2], puis 9 parmi 12 à compter du 1er janvier 2018 avec l’ajout d’une compétence « Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » dans les conditions prévues à l’article L. 211‑7 du code de l’environnement.

[1] Amendement n° II-735

[2] Article 65 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe)

Le projet de loi de finances pour 2017 supprime en son article 150 de la loi de finances pour 2016 qui organisait la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et notamment la suppression de la bonification de la DGF pour les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique.

Or l’article 65 de la loi NOTRe organise lui une extension du nombre de compétences minimales à exercer pour être éligible à la DGF bonifiée (art. L.5214-23-1 CGCT). Notons qu’étant donné que cet article devait être supprimé, la version diffusée sur Legifrance ne tient pas compte des ajouts de la loi NOTRe.

Dès lors, avec le projet de loi de finances pour 2017, les communautés de communes à fiiscalité professionnelle unique devront exercer à compter du 1er janvier 2017 au moins 6 compétences parmi 12 pour bénéficier de la bonification de leur dotation d’intercommunalité (au lieu de 4 sur 8 précédemment).

Les 12 compétences sont :

1° Actions de développement économique dans les conditions prévues à l’article L. 4251-17 ; création, aménagement, entretien et gestion de zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire ; politique locale du commerce et soutien aux activités commerciales d’intérêt communautaire ; promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme ;

2° En matière d’aménagement de l’espace communautaire : schéma de cohérence territoriale et schéma de secteur ; à compter du 1er janvier 2018, plan local d’urbanisme, document d’urbanisme en tenant lieu et carte communale ; zones d’aménagement concerté d’intérêt communautaire ;

3° Création ou aménagement et entretien de voirie d’intérêt communautaire ;

4° Politique du logement social d’intérêt communautaire et action, par des opérations d’intérêt communautaire, en faveur du logement des personnes défavorisées ;

4° bis En matière de politique de la ville : élaboration du diagnostic du territoire et définition des orientations du contrat de ville ; animation et coordination des dispositifs contractuels de développement urbain, de développement local et d’insertion économique et sociale ainsi que des dispositifs locaux de prévention de la délinquance ; programmes d’actions définis dans le contrat de ville ;

5° Collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés ;

6° En matière de développement et d’aménagement sportif de l’espace communautaire : construction, aménagement, entretien et gestion des équipements sportifs d’intérêt communautaire.

7° En matière d’assainissement : l’assainissement collectif et l’assainissement non collectif.

8° Aménagement, entretien et gestion des aires d’accueil des gens du voyage ;

9° Création et gestion de maisons de services au public et définition des obligations de service au public y afférentes en application de l’article 27-2 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

10° Eau.

Notons qu’il faut bien exercer chaque bloc de compétences en entier pour pouvoir comptabiliser la compétence. Ainsi, concernant l’aménagement de l’espace, la communauté de communes doit être compétente à la fois pour les SCOT mais aussi pour les zones d’aménagement concerté (ZAC).

En outre, à compter du 1er janvier 2018 (mais une nouvelle tentative de réforme de la DGF est supposée voire le jour pour 2018), le nombre de compétences à exercer pour bénéficier de la bonification de la DGF passerait à 9 sur 12.

Le groupe de travail parlementaire a présenté le 29 juin 2016 son rapport contenant des propositions de réforme de la DGF (à lire ici). Parmi celles-ci, une proposition a particulièrement retenue notre attention : le rebasage de la DGF des communes et des EPCI, pour 2017 (page 5 à 15 du rapport).

Un rebasage, pour quoi faire ?

Attention, jargon technique obligatoire ! La contribution au redressement des finances publiques (CRFP) est un prélèvement sur les recettes de fonctionnement de chaque collectivité et établissement public. Ce prélèvement est budgétairement imputé sur la dotation globale de fonctionnement, alors qu’il est sans rapport avec celle-ci.

La proposition de rebasage consiste donc à remodeler la dotation globale de fonctionnement des communes et EPCI dès 2017. Schématiquement, elle revient à imputer la minoration de la DGF sur la dotation de compensation (pour les EPCI) ou pour les communes, sur la compensation part salaires et la DCRTP ou le FNGIR (dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et Fonds national de Garantie Individuelle des Ressources (suite à la suppression de la taxe professionnelle), et non plus sur la seule dotation d’intercommunalité ou la seule dotation forfaitaire. Ce faisant, ces deux dotations deviennent plus lisibles et cohérentes dans la perspective d’une réforme en 2018.

Toutefois, le montant de la minoration peut être supérieur aux dotations auquel il est imputé.

Pour les EPCI, si le montant de la dotation de compensation et de la DCRTP et du FNGIR sont insuffisants pour financer le prélèvement CRFP, alors l’EPCI passera en prélèvement au titre du FNGIR (FNGIR négatif). Budgétairement c’est parfaitement neutre.

Pour les communes, la chose est plus compliquée. Tout d’abord, le groupe de travail propose le transfert obligatoire de la compensation part salaire, de la DCRTP/FNGIR à l’EPCI, y compris pour les EPCI en fiscalité additionnelle. C’est donc la création imposée d’une attribution de compensation quel que soit le régime fiscal.

Ensuite, le prélèvement CRFP qui était appliqué à la DGF des communes, serait … transféré à l’EPCI et imputé sur sa dotation de compensation (et FNGIR/DCRTP. Chaque EPCI paiera donc sa propre minoration (ou CRFP) ainsi que celles de ses communes membres.

 

Pour financer cela, et puisque des attributions de compensation seraient créé pour toutes les communes, en fiscalité professionnelle unique et en fiscalité additionnelle, il est proposé de réduire les attributions de compensation des communes du montant de leur prélèvement transféré à l’EPCI.

Simple non ? En résumé, la CRFP des communes est transféré aux EPCI et ceux-ci se “remboursent” en prélevant les sommes correspondantes sur les attributions de compensation des communes. Là encore, c’est budgétairement neutre.

Les problèmes posés par cette proposition

Les attributions de compensation sont au coeur du système de la fiscalité professionnelle unique. Ils sont le “garant” de transferts de compétences entre communes et EPCI budgétairement neutre et ne nécessitant pas de recourir à l’augmentation de la pression fiscale (à service équivalent). Ainsi, par exemple lorsqu’une commune transfère un équipement à son EPCI, commune une piscine au coût de fonctionnement et d’entretien de 300k€/an, les attributions de compensation de la-dite commune sont réduites de ces 300k€/an. L’EPCI a alors les moyens de financer l’équipement sans avoir à augmenter ses taux d’imposition.

De ce fait, le coefficient d’intégration fiscale (CIF), qui est utilisé pour la répartition de la dotation d’intercommunalité, tient compte des attributions de compensation. Pour mémoire, le CIF est égal aux rapport des recettes fiscales d’un EPCI minorées des attributions de compensation, par la somme des recettes fiscales de cet EPCI et de ses communes membres. Ainsi, plus les attributions de compensation sont faibles, plus le solde recettes fiscales de l’EPCI moins AC est fort, et plus le CIF est fort. Bref, en transférant des compétences (et des charges) à un EPCI, celui-ci augmente sa dotation d’intercommunalité. La fameuse incitation DGF au développement de l’intercommunalité.

Que se passera-t-il lorsque l’on imputera les contributions au redressement des finances publiques (CRFP) des communes sur les attributions de compensations ? Elles vont diminuer. Du côté du CIF, on l’a vu au paragraphe ci-dessus, cela va augmenter de fait le produit fiscal conservé par l’EPCI (recettes fiscales – AC). Et donc majorer son CIF.

Note

Imputer la minoration de la DGF sur les AC va entraîner des évolutions des coefficients d’intégration fiscale, et donc de la dotation d’intercommunalité, différentes suivant les EPCI et sans lien avec l’intégration fiscale effective

Ainsi, la proposition du groupe parlementaire d’imputer les CRFP des communes sur les attributions de compensation, va conduire à majorer les coefficient d’intégration fiscale de tous les EPCI de France. Et pas dans les mêmes proportions.

Ainsi, pour deux communautés de communes à fiscalité professionnelle unique de même population, même recettes et même compétences, si l’une de ces deux communautés a des communes qui ont plus de recettes de fonctionnement que l’autre (zone urbaine/rurale par exemple), alors cette communauté bénéficiera d’une réduction des AC plus importante et d’une augmentation de son CIF plus significative. Donc de sa dotation d’intercommunalité.

Le second problème posé par l’imputation de la minoration de la DGF ou CRFP dans les attributions de compensation est celui du calcul du potentiel financier des communes. En effet, celui-ci tient compte des attributions de compensation, mais ne tenait pas compte de la minoration de la DGF dans son calcul en 2016. Donc les potentiels financiers des communes les plus “riches”, celles ayant le plus de recettes de fonctionnement, diminueraient plus fortement (car leurs AC diminuerait plus fortement) que le potentiel financier de communes moins bien dotées.

Le projet de réforme de la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) inscrit dans la loi de finances pour 2016 (article 150) conduisait à fusionner les deux enveloppes actuelles de la DGF des EPCI, à savoir la dotation d’intercommunalité et la dotation de compensation (ex-compensation de la part salaires de la taxe professionnelle). Cette nouvelle enveloppe unique de la dotation d’intercommunalité est ensuite répartie selon des critères usuels : coefficient d’intégration fiscale, population et potentiel fiscal.

François Hollande annoncé le 2 juin, lors de son passage au congrès de l’Association des maires de France (AMF), le report de la réforme de la DGF au 1er janvier 2018. La réforme va donc être en grande partie récrite et sera inscrite dans un texte de loi spécifique.

Ainsi, si le projet de réforme prévu pour 2016 avait été maintenu, la fusion des composantes de la DGF aurait conduit à répartir en fonction de critères l’ancienne dotation d’intercommunalité et l’ancienne dotation de compensation. De ce fait, les EPCI qui avaient une dotation de compensation faible ou nulle avant la réforme, auraient vu leur DGF augmenter de manière significative.

En effet, sur les 2145 établissements publics de coopération intercommunale existants en 2014, plus de 88 % d’entre eux auraient vu leur DGF augmenter après la réforme. Parmi ceux-ci, les communautés de communes à fiscalité additionnelle(CCFA) auraient été particulièrement gagnantes puisque sur les 855 EPCI de cette catégorie en 2014, seul un aurait vu sa DGF diminuer du fait de la réforme. Il s’agit de la Communauté des communes du Mirebalais qui du fait de son fort potentiel fiscal (près de 210 euros par habitant) aurait connu une baisse de sa DGF.

Ainsi, la réforme de la Dotation Globale de Fonctionnement conduisait à revoir les « richesses » historiques de DGF, expliquées par des situations de forte ressource fiscale de la taxe professionnelle.

Les EPCI à faible dotation de compensation par habitant avant la réforme auraient donc été de ce fait majoritairement gagnants : leur DGF après réforme aurait été supérieure à celle avant réforme. Nos simulations montrent que le « décrochage » s’opère vers 50€ par habitant de dotation de compensation. C’est le niveau à partir duquel les EPCI auraient commencé à ne plus être tous gagnants à la réforme.

 A l’inverse, les EPCI qui disposent d’une dotation de compensation par habitant élevée (à partir de 75€ par habitant de dotation de compensation) sont très majoritairement perdants.

Notons toutefois que de manière exceptionnelle, certains EPCI à faible dotation de compensation peuvent figurer parmi les perdants de la réforme On peut citer l’exemple de deux CCFPU ; la CC de Soulaines et la CC de la Viadene. Ces deux EPCI vont voir leur DGF diminuer avec la réforme alors qu’elles ont une dotation de compensation faible. La CC de Soulaines a une dotation de compensation par habitant qui s’élève à 15,47€ et celle de la CC de Viadène approche les 19€ par habitant. Malgré cette faible dotation de compensation, ces deux CCFPU n’auraient pas été parmi les gagnantes de la réforme du fait de leur fort potentiel fiscal (444 € par habitant pour la CC de Soulaines et 521 € pour la CC de Viadene).

De la même manière, quelques rares intercommunalités à forte dotation de compensation à l’habitant auraient tout de même été gagnantes à la réforme, du fait de critères de répartition favorables (CIF fort ou potentiel fiscal faible). Ainsi, la Communauté urbaine de Nancy  du fait de son fort CIF (0,61) aurait vu sa DGF augmenter du fait de la réforme, bien qu’elle dispose d’une dotation de compensation élevée.

La réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) inscrite en loi de finances pour 2016 prévoit la création de 3 nouvelles dotations en remplacement des anciennes : une dotation d’intégration, une dotation de ruralité, et une dotation de centralité.

Si toutes les communes sont éligibles à la dotation d’intégration à hauteur de 75,72€ par habitant avant ajustement, la dotation de ruralité est réservée aux communes dont la densité de population est inférieure à 75% de la moyenne nationale (soit environ 78 hab/km²). Enfin, la dotation de centralité a elle vocation à être réservée aux villes centres qui ont des charges de centralité à financer, d’où son nom.

Sur cette troisième dotation, le mécanisme de répartition est inspiré du FPIC : la dotation est calculée au niveau de l’ensemble intercommunal (commune et EPCI). Les EPCI conservent une part correspondant à leur coefficient d’intégration fiscale. Le solde est réparti entre les communes en fonction de la population.

Mais comment arrive-t-on à partir d’une répartition à la population à identifier dans les équations la ou les villes principales qui assument des charges de centralité ? Le législateur a répondu à cette problématique de manière simple (voire simpliste), en appliquant une puissance 5 au poids de la population, ce qui permet de privilégier les communes les plus peuplées. Quelles conséquences ?

Ci-dessous deux exemples :

  • Le premier exemple est celui d’une intercommunalité rurale, avec une ville principale qui représente 28% de la population totale de l’EPCI, la seconde plus grosse commune représentant 21% de la population totale. Qui est la ville centre et qui assume les charges de centralité ?
DGF puissance 5 et dotation de centralité

DGF puissance 5 et dotation de centralité

Avec le rapport de population à la puissance 5, la ville ayant la plus forte population, dans cet exemple la commune 1 avec 4000 habitants, soit 28,3% du total, recevrait 78,2% du montant total de la dotation de centralité des communes. La commune suivant, 3000 habitants soit 21,2% du total, recevrait moins que son poids dans la population : 18,6% de la dotation de centralité des communes.

Ainsi, ce n’est pas l’importance de la population qui est valorisée, mais le poids de la population municipale dans le total de la population communautaire. Et la commune la plus peuplée est considérée ville centre et rafle la quasi-totalité de la dotation de centralité.

  • Dans ce second exemple, nous avons deux communes de taille quasi équivalente : 38 500 habitants pour la première (20,6% du total) et 35 000 habitants pour la seconde (18,7% du total).
DGF puissance 5 et dotation de centralité

DGF puissance 5 et dotation de centralité

Là encore, bien que l’écart de population soit faible, la commune la plus peuplée remporte “la mise” avec 59,9% de la dotation de centralité pour 20,6% de la population, alors que la deuxième commune la plus peuplée, très proche en terme de population, obtient 37,1% de la dotation pour 18,7% de la population de l’EPCI.

 Ainsi, l’application de la puissance 5 au rapport de la population pour la répartition de la dotation de centralité conduit mécaniquement à donner “une prime” à la commune la plus peuplée de l’EPCI. Si cette répartition conduit effectivement à attribuer la grande majorité de la dotation de centralité à la ville la plus peuplée, elle entraîne aussi une prime systématique à la commune la plus peuplée, au dépens parfois de la deuxième dont la taille démographique peut être proche.

Pour les EPCI, voici un petit outil pour vous aider, dans le cadre de la préparation budgétaire, à estimer le montant de la minoration de votre DGF en 2016. Pour les communes, votre outil est ici.

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Pour les communes, voici un petit outil pour vous aider, dans le cadre de la préparation budgétaire, à estimer le montant de la minoration de votre DGF en 2016. Pour les EPCI, votre outil est ici.

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Pour être éligible à la bonification de la dotation d’intercommunalité, le législateur impose aux communautés de communes à fiscalité professionnelle unique de répondre à deux conditions cumulatives :

  1. D’une part, la communauté de communes doit avoir une population comprise entre 3 500 et 50 000 habitants,
  2. Et d’autre part, la communauté de communes doit exercer au moins quatre des huit groupes de compétences listés à l’article L.5214-23-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) :

Extrait de l’article L.5214-23-1 du CGCT :

  • « En matière de développement économique: aménagement, entretien et gestion de zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale ou touristique qui sont d’intérêt communautaire ; actions de développement économique d’intérêt communautaire ;
  • En matière d’aménagement de l’espace communautaire : schéma de cohérence territoriale et schéma de secteur ; à compter du 1er janvier 2018, plan local d’urbanisme, document d’urbanisme en tenant lieu et carte communale ; zones d’aménagement concerté d’intérêt communautaire ;
  • Création ou aménagement et entretien de voirie d’intérêt communautaire ;
  • Politique du logement social d’intérêt communautaire et action, par des opérations d’intérêt communautaire, en faveur du logement des personnes défavorisées ;
  • En matière de politique de la ville : élaboration du diagnostic du territoire et définition des orientations du contrat de ville ; animation et coordination des dispositifs contractuels de développement urbain, de développement local et d’insertion économique et sociale ainsi que des dispositifs locaux de prévention de la délinquance ; programmes d’actions définis dans le contrat de ville ;
  • Collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés ;
  • En matière de développement et d’aménagement sportif de l’espace communautaire : construction, aménagement, entretien et gestion des équipements sportifs d’intérêt communautaire.
  • En matière d’assainissement : l’assainissement collectif et l’assainissement non collectif.»

Il est considéré par la jurisprudence administrative[1] que « s’agissant de la condition liée à l’exercice de certaines compétences [pour la bonification de la Dotation d’intercommunalité], seules les communautés de communes qui exercent […] l’ensemble des compétences énumérées à l’intérieur de chacun de ces groupes sont éligibles à la dotation d’intercommunalité majorée [et] qu’eu égard au principe de spécialité des établissements publics, le respect de cette condition par une communauté de communes s’apprécie au regard de ses statuts. »

Par conséquent, pour vérifier la conformité des compétences exercées par une communauté avec celles mentionnées par les dispositions de l’article L.5214-23-1 du CGCT, le juge administratif procède à l’examen des statuts de la communauté de communes concernée.

Ainsi, une communauté de communes, dont les statuts ne mentionneraient pas l’exercice de la compétence “zone d’aménagement concerté”, n’exercerait pas intégralement le groupe de compétences “aménagement de l’espace communautaire”. Celle-ci devrait alors exercer au moins 4 des 7 groupes de compétences restants pour remplir les critères d’attribution à la bonification de la DGF. Exemple similaire pour une communauté de communes qui n’exercerait que la compétence assainissement collectif et qui, de fait, ne serait pas compétente pour l’assainissement non collectif.

L’éligibilité à la dotation doit être constatée à la date à laquelle la communauté de communes remplit l’ensemble des conditions requises par arrêté du représentant de l’Etat dans le département. Une communauté de communes ne serait donc pas fondée à demander au juge administratif l’annulation d’une décision du Préfet lui refusant le bénéfice de la DGF bonifiée, si cette dernière n’exerce pas ou que très partiellement les compétences requises.

 


[1] CAA Marseille, 28 mai 2004, CC des CEPS et SYLVES, n°01MA00059 et CC du Pays de l’Or, n°01MA00102