Grenoble Alpes Métropole est devenue compétente en 2015 pour la voirie et a procédé à l’évaluation des transferts de charges. Au cours de l’année 2018, s’apercevant d’omissions dans l’évaluation, elle a procédé à une CLECT et une évaluation complémentaire selon la procédure de droit commun (rapport de CLECT puis 2/3 des conseils municipaux représentant 50% de la population ou l’inverse), considérant finalement qu’il ne s’agissait que de la « poursuite » ou de la finalisation de l’évaluation initiale défaillante sur certains points. La ville de Grenoble a porté l’affaire devant les tribunaux contre cette révision.

Le tribunal administratif de Grenoble, par jugement du 29 novembre 2021, a considéré que l’oubli d’éléments dans l’évaluation initiale n’autorisait pas à reprendre l’évaluation, dans la mesure où le rapport de CLECT et l’évaluation initiale n’apportaient aucune restriction sur le périmètre de l’évaluation. 

« Compte tenu de ces éléments, même s’il est vrai que le rapport initial de 2015 n’a pas spécifiquement recensé les bornes/barrières et les potelets permettant le contrôle des accès, ils doivent être regardés comme inclus dans les accessoires de voirie en l’absence de toute restriction et non comme constituant, à la date de la délibération contestée du 21 décembre 2018, un nouveau transfert de charges »

TA Grenoble, décision du 21/11/2021, n°1904084, point 6

Dès lors, la révision des évaluations des transferts de charges initiale ne peut être opérée. La seule méthode pour modifier les attributions de compensation aurait été la méthode libre (accord des 2/3 du conseil communautaire et du conseil municipal).

« En tout état de cause, à le supposer établi, l’oubli de comptabiliser une charge au moment du transfert de compétence ne peut s’analyser, notamment au regard du principe de sécurité juridique qui inspire les dispositions de l’article 1609 nonies C du CGI, comme un nouveau transfert de charge justifiant une nouvelle saisine de la CLECT et une révision du montant de l’attribution de compensation des communes concernées sauf circonstances particulières qui auraient fait objectivement obstacle à une telle évaluation au moment du transfert initial, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. »

TA Grenoble, décision du 21/11/2021, n°1904084, point 6

En conséquence, il n’est pas possible de revenir sur une évaluation des charges transférées, ce qui est le principe même des AC puisque celles-ci sont censées être figées, quand bien même il s’agirait de corriger des erreurs ou omissions. Cette décision met en exergue l’importance de l’exactitude et de l’exhaustivité du travail de la CLECT.

Dans le cadre d’une délégation de service public (DSP), un délégataire qui a une part significative de son activité provenant des usagers, est assujetti à la TVA. Il faut pour ce faire, que la part des recettes commerciales dépasse les 10% du chiffre d’affaires du délégataire (intégrant la contribution financière forfaitaire). Le cas échéant, si la collectivité verse un complément de prix (par exemple, pour la tarification sociale, la gratuité, ou d’autres raisons), alors ce complément sera assimilé à des recettes commerciales et devra être pris en compte pour s’assurer du dépassement du seuil des 10%. Le délégataire pourra donc déduire la TVA qu’il acquitte, ce qui permettra de réduire le coût pour la collectivité.

A partir du moment où la contribution financière forfaitaire (CFF) est, comme son nom l’indique, forfaitaire, c’est à dire déconnectée de l’utilisation réelle du service (donc non lié à la fréquentation ou aux recettes commerciales effectives), c’est à dire généralement calculée à partir des comptes d’exploitation prévisionnels, alors le contrat de délégation de service public peut être placé hors champ de la TVA, et la TVA ne s’appliquera pas sur la CFF.

L’absence de TVA sur la contribution financière forfaitaire a généralement pour conséquence l’assujettissement à la Taxe sur les salaires, notamment pour les transports publics de voyageurs. En effet, à partir du moment où le délégataire a un chiffre d’affaires qui est assujetti à la TVA à moins de 90% de son chiffre d’affaires total, celle-ci devient obligatoire.

La question peut alors se poser quant à l’opportunité d’assujettir la contribution financière forfaitaire à la taxe sur la valeur ajoutée, pour « économiser » la taxe sur les salaires.

Dans un tel cas de figure, la contribution financière forfaitaire sera majorée de la TVA, et pour que la collectivité puisse déduire cette TVA (la récupérer), il sera alors nécessaire que la collectivité soit destinataire des recettes commerciales (le délégataire percevra alors les recettes commerciales pour le compte de la collectivité, et les lui reversera, ou la collectivité les percevra directement). Ainsi, la collectivité aura des recettes assujetties à la TVA, et pourra donc déduire la TVA sur les dépenses du service (la CFF).

Cela implique par contre une organisation et des moyens, puisqu’il faut être en mesure de contrôler les recettes commerciales reversées par le délégataire, c’est à dire d’être en mesure de suivre la fréquentation de manière indépendante, et de créer une régie de recettes. Il faudra aussi redéfinir dans le contrat, la notion de risque commercial, qu’il faudra bien recréer (le risque commercial étant en général constitué par l’éventuel écart entre les recettes prévisionnelles et les recettes réelles de la délégation, et les dépenses prévisionnelles et les dépenses réelles.

Le choix entre l’assujettissement à la TVA ou non de la contribution financière forfaitaire, c’est à dire de l’application ou non de la taxe sur les salaires, dépend donc du montant de cette dernière au regard des coûts et contraintes qui seraient nécessaires pour l’éviter.