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La question du transfert obligatoire ou non des résultats budgétaires des compétences Eau potable et Assainissement est régulièrement posée, et nous l’avons abordée dans plusieurs articles sur ce blog (ici, ici et ). Nous vous proposons ici une synthèse et une actualisation du sujet.

Les compétences eau et assainissement relèvent d’un service public à caractère industriel et commercial (SPIC), à travers des budgets annexes distincts du budget principal. Le transfert des compétences Eau et Assainissement donnera lieu à la clôture des budgets annexes.

Le droit commun de la mise à disposition, prévu aux articles L.5211-5 et L.5211-17 du CGCT, ne diffère pas entre les SPIC et les services publics administratifs (SPA). Ainsi, le transfert de compétence relevant d’un SPIC à l’EPCI entraîne la mise à disposition à titre obligatoire des immobilisations nécessaires à l’exercice du service, ainsi que le transfert des droits et obligations y afférents, notamment les emprunts.

Le Ministère de l’Intérieur et le Ministère des Finances ont rappelé les modalités spécifiques qui s’appliquent en matière de clôture des budgets annexes des services publics à caractère industriel et commercial dans une circulaire commune de la Direction générale de la comptabilité publique et la Direction générale des collectivités territoriales (« L’intercommunalité après la loi du 12 juillet 1999, version actualisée du 02 juillet 2001, chapitre 1-3-5, page 17).

La circulaire prévoit une procédure en trois étapes :

  1. Clôture du budget annexe communal M49 dédié au SPIC et réintégration de l’actif et du passif dans le budget principal de la commune,
  2. Mise à disposition des biens meubles et immeubles utilisés, à la date du transfert, pour l’exercice de la compétence, ainsi que des emprunts et subventions transférables ayant servi à financer ces biens,
  3. Possibilité de transfert des excédents et déficits à l’EPCI.

Les opérations de clôture et de liquidation du budget annexe M49 ne sont pas des opérations budgétaires, elles n’affectent pas la comptabilité de l’ordonnateur. A l’issue de de la première étape budgétaire du transfert des compétences Eau et Assainissement, les résultats budgétaires ou excédents de clôture du budget annexe communal ainsi que les restes à réaliser sont donc nécessairement intégrés en totalité au budget principal de votre commune.

La règle générale est la suivante : les résultats budgétaires de l’exercice précédant le transfert de compétences sont maintenus dans la comptabilité de la commune, car ils sont la résultante de l’activité de celle-ci lorsqu’elle était compétente.
Toutefois, les SPIC constituent un cas particulier, puisque soumis au principe de l’équilibre financier (art. L.2224-1 CGCT) qui nécessite l’individualisation des dépenses et des recettes au sein d’un budget spécifique, assortie de l’impossibilité de financement par le budget principal (art. L.2224-2 CGCT, sauf dispositions spécifiques). De ce fait, les déficits et les excédents résultants strictement de l’exercice de la compétence peuvent être identifiés. S’il est donc interdit de transférer les résultats budgétaires des services publics administratifs, « s’agissant des SPIC, les résultats budgétaires du budget annexe communal, qu’il s’agisse d’excédents ou de déficits, peuvent être transférés en tout ou partie. Ce transfert doit donner lieu à délibérations concordantes de l’EPCI et de la (des) commune(s) concernée(s). ».

Le transfert des résultats budgétaires à l’EPCI bénéficiaire du transfert de compétence ne constitue donc pas une obligation mais relève d’une possibilité.

1. LA POSITION DE LA DIRECTION GENERALE DES COLLECTIVITES LOCALES

De plus, la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) précise, dans une fiche relative aux conséquences des transferts de compétence (Guide pratique de l’intercommunalité, édition 2006, fiche 316.3) qu’ :
« Hormis le cas des SPIC, les résultats budgétaires de l’exercice précédant le transfert de compétence sont maintenus dans la comptabilité de la commune, car ils sont la résultante de l’activité exercée par celle-ci lorsqu’elle était compétente.
Or, les SPIC sont soumis au principe de l’équilibre financier, posé par les articles L.2224-1 et L.2224-2 du CGCT. L’application de ce principe nécessite l’individualisation des opérations relatives aux SPIC dans un budget spécifique et son financement par la seule redevance acquittée par les usagers.
C’est pourquoi, il est admis que les résultats budgétaires du budget annexe communal qu’il s’agisse d’excédents ou de déficits, peuvent être transférés en tout ou partie. Ce transfert doit donner lieu à délibérations concordantes de l’EPCI et de la (des) commune(s) concernée(s). »

La position de la DGCL confirme qu’une commune n’a pas l’obligation légale de transférer le résultat issu de l’exercice des compétences Eau et Assainissement. Le transfert des résultats budgétaires d’un SPIC au budget de son EPCI  est une possibilité dérogatoire au principe général de maintien dans le budget principal des résultats budgétaires des budgets annexes clos.

Dans l’hypothèse où une commune souhaiterait effectuer ce transfert, il devra alors donner lieu à délibération concordante entre l’EPCI et la commune, ce qui confirme le caractère facultatif de ce transfert.

2. POSITION DU JUGE ADMINISTRATIF

2.1. OBLIGATION DE TRANSFERT DES RÉSULTATS BUDGÉTAIRES LORSQU’ILS SONT INDISPENSABLES A ÉQUILIBRE RÉEL DU COMPTE ADMINISTRATIF DES BUDGETS ANNEXES CONCERNÉS

Le juge administratif est plus strict sur les conditions de transfert des résultats budgétaires d’un SPIC (TA Versailles, 7 mai 2009 SAMVE c/ Cme de Maisse). En l’espèce, dans le cadre d’un transfert de la compétence « assainissement » à un syndicat de communes, il a imposé le transfert de l’excédent du service d’assainissement communal puisque ce dernier était financé par la redevance perçue sur les usagers et affecté au service d’assainissement pour amortir les équipements.
La jurisprudence administrative semble donc considérer comme obligatoire le transfert des résultats budgétaires, dès lors qu’ils sont indispensables à l’équilibre réel du compte administratif du budget annexe concerné.

2.2. NON OBLIGATION DU TRANSFERT DU SOLDE DU COMPTE ADMINISTRATIF DES BUDGETS ANNEXES TRANSFÉRÉS A L’EPCI

Le juge administratif dans son arrêt CE, 25 mars 2016, SIAEPA de Semur-en-Auxois c/ Cme de la Motte-Ternant, a confirmé le caractère facultatif du transfert des résultats budgétaires des budgets annexes de SPIC. Ici, le juge parle de solde du compte administratif, qui comprend donc des résultats excédentaires, ou déficitaires, dans le 2ème et 3ème considérant de son arrêt :

« 2. Considérant qu’aux termes l’article L. 5211-18 du code général des collectivités territoriales : […] II.-Le transfert des compétences entraîne de plein droit l’application à l’ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu’à l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert (…) Le transfert d’une compétence entraîne de plein droit la mise à la disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l’exercice de cette compétence. »

« 3. Considérant que […] le solde du compte administratif du budget annexe d’un service public à caractère industriel ou commercial ne constitue pas un bien qui serait nécessaire à l’exercice de ce service public, ni un ensemble de droits et obligations qui lui seraient attachés ; que […] les dispositions précitées n’imposaient pas le transfert du solde du compte administratif du budget annexe du service transféré […].»

3. CONCLUSION

Le transfert des résultats budgétaires des budgets annexes Eau et Assainissement collectif à l’occasion d’un transfert de compétence ne constitue donc pas une obligation mais relève toujours d’une simple possibilité, dans la mesure où ces résultats constituent des ressources non indispensables à l’équilibre du compte administratif des budgets annexes Eau et Assainissement.