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De nombreux territoires ont engagé ces derniers mois les démarches de transfert des compétences « eau & assainissement » des communes vers les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale, transfert rendu obligatoire à l’horizon 2020 depuis l’adoption de la Loi NOTRe.

Le transfert de compétence est une procédure qui, au fil du temps et des réformes territoriales, est désormais de mieux en mieux maîtrisée par les acteurs locaux, élus et techniciens. Le domaine de l’adduction en eau potable « production, transport, stockage, distribution » se distingue néanmoins de par la préexistence de syndicats intercommunaux et de syndicats mixtes dans les territoires.

Le plus souvent créés dans une optique d’exploitation et de gestion d’une ressource, ces syndicats n’ont pas vu leur périmètre évoluer au gré des réformes successives de la coopération intercommunale, plutôt basée sur le volontarisme politique et la reconnaissance des bassins de vie et de services.

Le Bulletin d’Information Statistique de la D.G.C.L. n°116 du mois de juin 2017, indique « qu’au 1er janvier 2017, près de 3 800 syndicats ont une compétence eau ou assainissement ». A la même date, à titre de comparaison, il ne subsiste que 1 266 E.P.C.I. à fiscalité propre, couvrant 100% du territoire et de la population, et issus des nombreuses fusions intervenues en 2016.

La diminution du nombre de syndicats intercommunaux ou mixtes, devrait donc en toute logique se poursuivre d’ici à 2020, au fur et à mesure des transferts des compétences « eau » et « assainissement » des Communes vers les Intercommunalités.

Deux situations doivent cependant être distinguées :

La Loi NOTRe en son article 67 pose le principe d’une substitution de plein droit du syndicat par l’Etablissement Public de Coopération Intercommunale à fiscalité propre. Le Syndicat, qu’il soit intercommunal ou mixte, est dès lors dissous de plein droit.

Toutefois, pour garantir la pérennité des syndicats qui portent le service public sur un territoire conséquent, ce qui se traduit par un périmètre qui couvre des communes appartenant à au moins trois E.P.C.I. à fiscalité propre, c’est un mécanisme de représentation-substitution qui est mis en œuvre, la Communauté de Communes se substituant alors de plein droit aux Communes.

Dans ce second cas de figure, quelles sont alors les conséquences pour le syndicat intercommunal ?

La procédure s’appliquant de plein droit, aucun avis préalable n’est sollicité auprès du syndicat, aucune demande d’adhésion n’est formulée. Le syndicat intercommunal devient un syndicat mixte au sens de l’article L5711-1. Ce changement est constaté par un arrêté préfectoral.

Le changement donnera simplement lieu à une mise à jour des statuts du syndicat, principalement en ce qui concerne sa composition. Il s’agit d’adapter le syndicat à son environnement juridique. Il ne s’agit donc pas de créer un nouvel établissement (comme cela a pu être le cas lors des nombreuses fusions d’E.P.C.I. en 2016) avec toutes les conséquences juridiques et comptables que cela peut entraîner.

Enfin, il reviendra à l’E.P.C.I. nouvel adhérent de désigner ses représentants, en lieu et place des délégués désignés par les conseils municipaux, dont il sera mis fin automatiquement au mandat.

Par contre, les textes de Loi ne prévoient pas que la transformation entraîne une remise en cause des mandats de l’ensemble des délégués, pas plus que ceux du Président ou des membres du bureau. Le syndicat n’aura donc pas à procéder du fait de l’application du mécanisme de représentation/substitution au renouvellement de ses instances.

Il existe plusieurs procédures permettant à une commune de se retirer d’un syndicat intercommunal :

Procédure de droit commun : par délibération de la commune souhaitant se retirer, avec accord de l’organe délibérant du syndicat à la majorité simple et de l’ensemble des conseils municipaux membres du syndicat à la majorité qualifiée*(article L. 5211-19 du CGCT).

Procédures dérogatoires :

1/  Après avis de la Commission Départementale de Coopération Intercommunale (CDCI), le Préfet peut autoriser la commune à se retirer du syndicat :

  • Si, par suite d’une modification de la réglementation ou de la situation de la commune au regard de cette réglementation, la participation de cette commune au syndicat est devenue sans objet (article L. 5212-29 du CGCT).
  • Pour adhérer à une communauté de communes (article L. 5212-29-1 du CGCT).

2/  Lorsqu’une commune estime que les dispositions liées à la représentativité au sein du comité syndical, aux compétences exercées par le syndicat, ou aux contributions financières de la commune au syndicat, sont de nature à compromettre son intérêt à participer à l’objet syndical, elle peut demander son retrait du syndicat ou la modification des dispositions statutaires en cause, selon la procédure de droit commun (article L. 5212-30 du CGCT).

 

Le retrait d’une commune d’un syndicat entraine des conséquences en termes de répartition patrimoniales et financières. L’article L. 5211-25-1 du CGCT prévoit les modalités de répartition applicables en cas de retrait :

Les biens mis à la disposition du syndicat par la commune sont restitués dans le patrimoine de la commune. Le solde de l’encours de dette, afférente à ces biens, non remboursé à la date du retrait, est également repris par la commune.

En ce qui concerne les autres biens (construits ou acquis par le syndicat), le principe d’équité s’applique pour leur répartition entre le syndicat et la commune. Ainsi, pour des raisons de situation géographique, les biens situés sur le territoire de la commune pourraient être restitués à la commune tandis que les biens situés sur le territoire d’une commune membre du syndicat auraient vocation à rester dans le patrimoine du syndicat.

A défaut d’accord par délibérations ou par convention entre la commune et le syndicat dans la répartition des biens, elle sera fixée par le Préfet.

En ce qui concerne l’encours de dette, seules les procédures dérogatoires prévoient explicitement que le retrait peut être subordonné à la prise en charge par la commune d’une quote-part des annuités de dette afférentes aux emprunts contractés par le syndicat pendant la période où la commune en était membre.

 

* Majorité qualifiée : les deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population.

L’évaluation des transferts de charges s’inscrit dans la logique fondamentale du régime de la fiscalité professionnelle unique. De l’évaluation dépend en effet la détermination de l’attribution de compensation versée aux communes. Le respect des principes de neutralisation financière des transferts dépend donc également de la procédure d’évaluation mise en œuvre.

A la création d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) faisant application de la fiscalité professionnelle unique, les communes ont transféré à la communauté une partie de leurs ressources fiscales, ainsi que certaines dépenses. En contrepartie, la communauté reverse à ces communes une attribution de compensation égale au solde recettes – dépenses transférées.

Attribution de compensation  =  Produits fiscaux transférés – Coût net des charges transférées

Les communes continuent donc de financer indirectement les charges qu’elles ont transférées, mais à leurs valeurs « historiques ». L’augmentation du produit de fiscalité professionnelle après la date du transfert doit ainsi permettre de financer l’accroissement des charges transférées et les charges nouvelles.

L’enjeu financier de l’évaluation des transferts de charges est de donner les moyens au groupement d’assumer les compétences qui sont les siennes au regard des conditions dans lesquelles elles étaient antérieurement assumées dans les communes. D’une évaluation « juste » dépendent les équilibres financiers futurs de la communauté et des communes membres.

Le principal risque réside dans le danger de la sous-évaluation des transferts de charges. En cas de sous-évaluation, la communauté ne dispose pas des moyens de financer intégralement les charges qui lui sont transférées via la réduction de l’attribution de compensation. Cette réduction est en effet trop faible et les attributions de compensation versées aux communes sont trop élevées. Dans ce cas, la communauté devra trouver un moyen d’équilibrer son budget.

Ce rééquilibrage peut s’opérer de deux manières :

  • Par la réduction des charges : c’est alors la dotation de solidarité communautaire (DSC) ou les fonds de concours, ou toute autre variable qui joue le rôle de variable d’ajustement ;
  • Par l’augmentation des ressources : dans le respect des règles de liaison des taux, la communauté devra augmenter le taux de CFE et/ou instituer une fiscalité mixte. Dans ce cas, la DSC n’est pas réduite et la sous-évaluation des transferts permet aux budgets communaux de financer de nouvelles charges. Sur le plan de la pression fiscale, la situation est donc « inflationniste ».

A l’inverse, en cas de surévaluation, les budgets communaux sont déséquilibrés : le montant de la retenue sur attributions de compensation (perte de recette pour les AC positives, dépense plus forte pour les AC négatives) ne sont pas compensées par des dépenses qui ne sont plus à financer (puisque transférées à l’intercommunalité).

En réponse à une question parlementaire(1), la DGCL a diffusé la liste des 50 communautés d’agglomération les plus endettées, avec leur taux d’endettement sur les années 2005 à 2009. Le ratio du taux d’endettement présenté est celui de l’encours de dette sur les recettes réelles de fonctionnement).

Endettement des communautés d

En 2009, c’est la CA de Saint Quentin en Yvelines qui apparaît dans ce classement la plus endettée parmi les Communautés d’Agglomération. Pour autant, sa situation semble a priori moins “critique” que la CA Montpellier Agglomération, qui arrive en 2ème position. En effet, le taux d’endettement de la CA Saint Quentin en Yvelines est resté stable sur la période 2005-2009, ce qui peut laisser penser que la CA, malgré un fort endettement, n’entre pas dans une boucle infernale d’endettement. La CA Montpellier a elle vu son taux d’endettement augmenter de 45% (passage de 116% à 161%). Elle figure ainsi en 6ème position de la plus forte progression du taux d’endettement des CA entre 2005 et 2009.

La Communauté d’Agglomération Toulon Provence Méditerranée est la CA qui affiche la plus forte progression du taux d’endettement : il est passé de 17,30% en 2005 à 93,90% en 2009, soit une augmentation de 76,6%. La CA Perpignan Méditerranée arrive en seconde position, avec un taux d’endettement passé de 50,30% en 2005 à 120,30% en 2009, soit une augmentation de 70%.

Accéder au fichier excel en cliquant ici.

 


(1) Question du député François Rochebloine, n°7830, réponse publiée au JO le 15/11/2011, page 12012.

 

Il convient de faire un point sur le découpage administratif de la France. Au 1er janvier 2010, la France était constituée de :

1/ 36 682 communes,

dont Communes appartenant à un groupement :

  • 34 774 communes (95%),
  • 57,9 millions d’habitant (89%)

dont Communes isolées :

  • 1 908 communes isolées (5%), dont :

–          1 697 communes de moins de 3 500 habitants (89% du total)

–          1 074 communes de moins de 500 habitants (56% du total)

  • 7 millions d’habitants (11%)

2/ 2 611 EPCI à fiscalité propre,

  1. 16 CU,
  2. 181 CA,
  3. 2 409 CC,
  4. 5 SAN.

3/ 15 378 syndicats.

  1. 10 789 SIVU,
  2. 1 395 SIVOM,
  3. 3 194 syndicats mixtes.
  • 26% des groupements ont moins de 5 000 habitants
  • 29 communautés en sont constituées que de 2 communes (dont 1/3 en Île-de-France).

La France compte plus de 36.000 communes, soit à elle seule plus que toutes les communes de l’Europe des 12 réunis (Europe de l’Ouest et la Grève hors les pays nordiques). En outre, chaque commune peut appartenir à un ou plusieurs syndicats : 61% des communes appartiennent à 4 syndicats.

Inévitablement, la question du nombre de structures à l’échelon communal se pose. N’est-il pas possible d’en réduire le nombre ? Et pour quels objectifs ?

La réforme territoriale initiée par la loi du 16 décembre 2010 poursuit trois objectifs : le renforcement de l’intercommunalité, l’achèvement de la carte intercommunale et la rationalisation de l’intercommunalité.

L’idée sous-jacente au regroupement des communes en intercommunalités, et à la réduction du nombre de structures, est souvent de bénéficier des fameuses « économies d’échelle ».

De manière très simplifiée, l’équation pourrait s’écrire ainsi :

Réduction du nombre de structures => réduction des dépenses => réduction du déficit et/ou des impôts

L’intercommunalité a justement été mise en avant comme un vecteur d’économies d’échelles pour les communes. Pour autant, force est de constater que l’existence d’économies budgétaires suite à la mise en place d’une intercommunalité n’est pas avérée. Pourtant, en mutualisant leurs compétences et en regroupant leurs moyens, on pourrait s’attendre a priori à ce que le coût de « production » du service public diminue. Alors pourquoi n’y a-t-il pas d’économies ?

La première réponse réside dans la méconnaissance de la définition des économies d’échelles. Reprenons la définition d’une « économie d’échelle ». L’économie d’échelle est la baisse du coût unitaire d’un produit obtenu en accroissant la quantité de la production. En termes plus simples, une économie d’échelle, c’est produire plus et que chaque unité de service produite coûte moins chère que la précédente.

Avec le transfert de compétences à l’intercommunalité, la production de services publics est concentrée auprès d’une structure. Il est même possible qu’il y ait une diminution du coût unitaire, surtout lorsqu’une compétence est transférée en totalité, permettant de ce fait un transfert de la gestion administrative de la compétence et non un doublement de la gestion (en cas de transferts de bouts de compétences, chaque structure a besoin d’agents pour effectuer les tâches administratives, et cela conduit à un doublonnement des postes).

Mais il y a aussi dépense supplémentaire. La notion d’économie d’échelle est victime de son appellation : « économie ». Une économie d’échelle n’est pas une économie budgétaire. Le passage en intercommunalité permet peut être de produire plus et moins cher, mais si ce supplément de production généré par le passage en intercommunalité n’aurait pas été réalisé en l’absence de transfert de compétence, alors il y a bel et bien dépenses supplémentaires, et non économies.

Pourquoi cette situation ? Tout simplement parce que l’on peut se demander pourquoi transférer une compétence à l’échelon intercommunal si c’est pour rendre le même service qu’une commune isolée. L’économie budgétaire n’est pas visible par la population.

Par son besoin de justification, l’intercommunalité conduit inévitablement à une amélioration de l’offre de services à la population. Les communes périphériques des villes centres bénéficient de nouveaux services, de nouveaux équipements sont construits par l’agglomération, … Cela a un coût.

Finalement, on observe que l’intercommunalité peut conduire à étoffer l’offre de services avec un coût marginal décroissant (ce n’est pas toujours vérifié). C’est le principe de l’économie d’échelle. Mais cette offre de service supplémentaire, bien que coûtant moins chère que si les communes prisent individuellement l’avaient réalisée, constitue bien une dépense supplémentaire, justement parce que les communes prises individuellement ne l’auraient pas réalisée.

Le rapport du sénateur Dallier de 2006 est d’ailleurs éloquent sur ce point :

Rapport d’information sur l’intercommunalité, Philippe Dallier, Sénateur, Observatoire de la Décentralisation, 1er février 2006 :

« Pour constater des économies d’échelle [ndlr : et pour qu’il y ait économies budgétaires], il faut qu’à qualité de service inchangée, le coût de ce service pour l’usager baisse parce que les facteurs de production du service ont été utilisés plus efficacement et à la bonne échelle territoriale ou démographique. […]

L’intercommunalité ne pouvait pas échapper à la règle selon laquelle celui qui reçoit une compétence veuille montrer qu’il fait mieux que son prédécesseur. Il est également vrai que les communes-membres d’un EPCI sont souvent plus exigeants avec lui qu’elles ne l’étaient pour elles-mêmes dans l’exercice des compétences transférées quand elles assuraient elles-mêmes ces compétences.

Enfin, les présidents d’EPCI ont souhaité donner des bases solides et une visibilité accrue à leur établissement et cela passait par des locaux et du personnel. Le résultat est qu’aujourd’hui, l’intercommunalité a fait croître la dépense publique et le nombre de fonctionnaires et ce reproche nuit désormais à l’appréciation des premiers résultats tangibles qu’elle a offerts à ses administrés. […]

Cette situation entraîne un «doublonnement» des postes dans la mesure où les communes ont conservé leur capacité d’intervention et donc leur personnel.»

La loi relative à la réforme territoriale du 16 décembre 2010 a modifié les règles relatives aux votes des transferts de compétences. La réponse ministérielle vient rappeler ces principes.

Antérieurement à la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, l’accord des conseils municipaux des communes dont la population était supérieure au quart de la population regroupée, était nécessaire. Ainsi, dans certains cas, plusieurs communes, dès lors que leur population était supérieure à ce seuil, pouvaient détenir un droit de veto sur l’évolution des compétences.

Une disposition relative à la limitation du bénéfice du droit de veto figure dans la loi de réforme des collectivités territoriales. L’article 10 prévoit ainsi que, quelle que soit la catégorie d’EPCI à fiscalité propre, le droit de veto est détenu par la seule commune dont la population est la plus importante dès lors qu’elle représente plus du quart de la population totale intéressée. Le législateur n’a ainsi pas entendu supprimer toute possibilité de veto, “afin d’éviter que des transferts de compétence ne soient imposés à la ville-centre“, mais il a restreint le bénéfice de ce veto à une seule commune et à la condition expresse que le nombre de ses habitants soit suffisamment significatif par rapport à la population totale concernée.

Réponse ministérielle question Assemblée Nationale N°81524, réponse publiée au JO du 08/03/2011, page 2244.

A l’aube de la réforme territoriale et de la rationalisation de l’intercommunalité, la DGCL a publié le bilan statistique de l’intercommunalité pour 2011. Au 1er janvier 2011, le nombre d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre s’élève à 2599 ; s’y ajoutent 11 831 syndicats de communes et 3 268 syndicats mixtes. L’intercommunalité à fiscalité propre couvre ainsi 95,5 % des communes et près de 90 % de la population. L’effectif de communes isolées s’est réduit à 1 592 (hors Paris et les départements de la petite couronne).

Le bulletin fait un aparté sur les syndicats : 99,6 % des communes sont également membres d’un syndicat de communes ou d’un syndicat mixte. Le nombre de syndicats a diminué de seulement 7,6 % en 5 ans. Dans 57 départements, les communes adhèrent en moyenne à 4 syndicats ou plus. Au niveau national, un département compte en moyenne 50 syndicats pour 100 communes, mais 15 départements enregistrent moins de 30 syndicats pour 100 communes et 15 autres plus de 60 pour 100 communes. En moyenne, une commune est membre de 4,2 syndicats.

Accéder au BIS N°79